Des GOPE à la coordination renforcée

Michel Dévoluy, Université de Strasbourg (BETA).

Une Résolution du parlement européen du 4 octobre 2001 démontre que l’Europe est prête à renforcer la coordination des politiques économiques dans la zone euro.

Mot-clef : Grandes orientations de la politique économique (GOPE).

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Michel Dévoluy « Des GOPE à la coordination renforcée », Bulletin de l’Observatoire des Politiques Économiques en Europe, vol. 5, 3 - 4, Hiver 2001.

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Les procédures de coordination mises en place par le Traité sur l’Union européenne s’articulent sur les GOPE que nous commentons régulièrement dans ce Bulletin et sur le pacte des stabilité et décroissance, élaboré en juillet 1997 sur la base de l’article 104. Il faut y ajouter le Titre VIII sur l’emploi (art 125 à 130) introduit à Amsterdam. D’autres voies vers la coordination ont été ouvertes en dehors du Traité. Nous retiendrons les deux principales : l’Eurogroupe, lancé en décembre 1997, qui permet de resserrer la communication informelle entre les ministres de l’Ecofin appartenant à la zone euro.Et le Processus dit de Cologne, décidé au Conseil européen de juin 1999, qui instaure un dialogue macroéconomique, lui aussi informel, entre les autorités politiques et monétaires de l’UE et les partenaires sociaux.

Déjà le Conseil européen d’Helsinki décembre 1999 avait conclu, après une année de pratique de l’euro, à la nécessité de renforcer certaines modalités de coordination. En écho à cette demande, la Commission a présenté une Communication, le 7.2.2001, « sur le renforcement de la coordination des politiques économiques au sein de la zone euro ». Cette communication a donné lieu à un Rapport de la Commission économique et monétaire du Parlement européen (PE) du 14 septembre 2001 (rapporteur Pervenche Berès). Finalement, la résolution du PE du 4 octobre 2001 représente l’aboutissement de la réflexion initiée à Helsinki sur les insuffisances des mécanismes de coordination. On retrouve ainsi les conclusions de l’analyse économique qui avaient, très tôt, insisté sur la nécessité d’introduire une forme de policy-mix européen dès la mise en place de l’euro.

Le Rapport du PE parle du « caractère inachevé » de la mise en œuvre de l’UEM (qui) a pu être masqué par la forte croissance de la zone euro. Il indique que « (le) constat d’une coordination encore embryonnaire et balbutiante est partagé par la plupart des acteurs et des observateurs du débat économique européen, quelque soit leur sensibilité politique ». Ce constat se fonde sur quelques grands traits que nous reprenons de « l’exposé des motifs » du Rapport.

  • Actuellement, la coordination budgétaire se pratique uniquement à travers des règles, alors qu’il faudrait aller vers des politiques nationales contracycliques coordonnées.
  • On compte beaucoup trop sur l’émulation entre pairs (peer pressure) pour faire converger les politiques économiques.
  • Les stratégies non coopératives sont encore trop nombreuses, notamment en matière fiscale. Or elles sont toujours des vecteurs de tensions.- Les GOPE ont des objectifs trop multiples et pas assez contraignants.
  • Les parlements nationaux débattent insuffisamment de la coordination européenne.

La Résolution du PE, qui se fonde sur le Rapport du PE et sur la Recommandation de la Commission, propose des perspectives dont nous privilégions certains aspects.

  • À terme, le renforcement de la coordination devra se traduire par une modification du Traité et/ou à travers des procédures de coopérations renforcées pour les pays de la zone euro.
  • Il faut instaurer des échanges d’informations systématiques, approfondis et harmonisés entre États, avant les prises de décisions de politiques économiques. Il est souhaité que les procédures budgétaires nationales intègrent les recommandations des GOPE.
  • Chaque parlement national devrait débattre du programme de stabilité présenté annuellement à la Commission dans le cadre du Pacte de stabilité et de croissance.
  • Le PE se félicite du projet de la Commission de publier un rapport régulier sur l’économie de la zone euro. Une base trimestrielle est suggérée.
  • Le Comité économique et financier et le Comité de politique économique doivent assurer une meilleure prise en compte des questions structurelles dans une perspective de coordination et dans le but de définir des stratégies communes à moyen terme.
  • Le PE voudrait être associé au dialogue macroéconomique initié au sommet de Cologne.

L’Europe a peu écouté les économistes qui préconisaient la recherche d’une forme de policy-mix pour la zone euro. Mais elle apprend vite des faits. Le renforcement de la coordination des politiques économiques est en marche. Les projets concrets n’ont pas encore émergé mais les problèmes sont posés et des pistes sont ouvertes. Le tabou de la révision éventuelle des textes fondateurs est levé. Il s’agit de rien moins que de parfaire la construction d’un fédéralisme économique à l’européenne.

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