Éditorial — L’image de l’Europe
Michel Dévoluy, Université de Strasbourg (BETA).
L’année 2002, sur laquelle ce bulletin porte particulièrement son attention, possédait tout pour devenir une année charnière dans la dynamique de la construction européenne. L’image de l’Europe pour les Européens et dans le monde devait en sortir grandie. Il y avait à cela trois raisons : l’euro fiduciaire, l’élargissement et la Convention. L’introduction de l’euro fiduciaire, le 1er janvier, fut un succès.
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Michel Dévoluy « Éditorial — L’image de l’Europe », Bulletin de l’Observatoire des Politiques Économiques en Europe, vol. 8, 1 - 2, Été 2003.
L’année 2002, sur laquelle ce bulletin porte particulièrement son attention, possédait tout pour devenir une année charnière dans la dynamique de la construction européenne. L’image de l’Europe pour les Européens et dans le monde devait en sortir grandie. Il y avait à cela trois raisons : l’euro fiduciaire, l’élargissement et la Convention. L’introduction de l’euro fiduciaire, le 1er janvier, fut un succès.
L’ouverture, le 28 février, des travaux de la Convention sur l’avenir de l’Europe ouvrait la voie vers des réformes institutionnelles majeures. La présentation, le 9 octobre, des dix pays prêts pour les procédures d’adhésion concrétisait des espoirs et des perspectives.
Mais l’année 2002 fut économiquement morose avec une croissance sans cesse revue à la baisse et des finances publiques fragilisées. L’euro dans les portes monnaies n’a pas apporté la réactivité économique espérée. Le début de 2003 prolonge, hélas, 2002 sur le terrain économique. On pouvait au moins s’attendre à ce que l’année 2003 capitalise les deux points forts que sont les perspectives de l’élargissement et la Convention. Mais c’est l’Irak qui a couvert le terrain. Cette guerre a largement démontré que l’Europe n’est pas une puissance mondiale. Les quinze se sont divisés et certains futurs membres ont manifesté une confiance modérée dans l’Europe communautaire.
Naturellement, la guerre en Irak n’a pas contribué à faire souffler l’esprit européen au sein de la Convention. Bref, la dynamique que l’on pouvait espérer début 2002 n’a pas été au rendez-vous.
Toutes ces déceptions étaient programmées à travers l’absence de construction politique de l’Europe. L’euro a besoin d’une politique économique et l’Europe doit devenir une puissance mondiale. L’euro ne sera un vecteur de soutien à la croissance que s’il est adossé à une politique économique européenne. Cet enseignement doit être sans cesse rappelé. Nous ne sommes toujours pas dans cette configuration. Lorsque douze pays ont une monnaie unique ils doivent se doter de beaucoup plus qu’un simple « règlement de copropriété » pour gérer cette monnaie (nous reprenons ici l’expression imagée du Commissaire Michel Barnier). S’il ne
fallait qu’un règlement, le Pacte de stabilité suffirait. Mais le pilotage de l’économie exige de dépasser ce stade. Il appelle une vision commune soutenue par des choix budgétaires communs.
Une des missions de l’Europe est de devenir une puissance mondiale. C’est l’intérêt de toute la communauté internationale. L’attraction pour un monde unipolaire, dominé par les Etats Unis, n’est pas souhaitable. Un seul Etat fort face à beaucoup d’autres produira toujours un équilibre géopolitique instable et conflictuel sur le long terme. La stabilité et la concorde passent par un monde multipolaire construit sur le droit. Jusqu’ici, les sociétés humaines n’ont pas trouvé mieux pour vivre ensemble. Pour être une puissance, l’Europe soit se doter d’une armée. Pour cela, de grosses dépenses s’imposent. Et on répond ainsi largement à la question précédente du budget commun.
L’euro comme la géopolitique appellent donc une Europe politique. Puisque tous les Etats membres n’y sont pas prêts, il faut commencer sans eux, mais avec des portes toujours grandes ouvertes. La Convention sur l’avenir de l’Europe devrait faciliter ce choix constructif.
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