La « boîte à outils » de l’analyse input-output de Leontief
Jean Arrous, Professeur honoraire à l’université de Strasbourg et membre du BETA depuis 1972.
Le nom de Wassily Leontief, prix Nobel 1973, est associé à l’analyse input-output dont il est l’inventeur. Une analyse qui décrit l’activité économique à partir de celle des branches et, de là, remonte jusqu’au calcul du PIB. Largement passée sous silence par le découpage de notre discipline entre micro et macroéconomie, cette analyse n’est pas seulement une théorie formelle, elle est également une stratégie de recherche qui a donné lieu à de multiples développements. En ces temps d’une planète largement perturbée par les décisions du président Trump sur l’automobile, la chimie, le textile, la parfumerie, les composants électroniques et autres, l’analyse input-output est directement adaptée à l’analyse des conséquences de ces décisions. J’ai récemment publié Une initiation à l’économie avec Leontief. Un outil pour la transition écologique et énergétique, De Boeck Supérieur, septembre 2024. Le présent article expose les nombreux « outils » de la théorie formelle et les applications de la stratégie de recherche à la transition écologique et à la transition énergétique. Le texte qui suit est une interview de l’auteur par l’un de ses collègues. Que ce dernier, qui a préféré rester anonyme, en soit ici vivement remercié. Mes remerciements vont également à Ragip Ege et à Moïse Sidiropoulos pour leur lecture de ce texte, leurs commentaires et leurs encouragements.
Codes JEL : A23, C67, D33, D57, E01, E17, E23, J21, L16, L23, L6-L9, O13, P18, P28, Q4, Q5
Mots-clefs : frontière des possibilités de production, analyse input-output, frontière des prix des facteurs, Leontief, marge de profit et taux de marge structurel, matrice augmentée de Leontief, matrice inverse de Leontief, matrice technologique, prix d’équilibre, répartition du revenu national, tableau input-output, technologie de Leontief, théorèmes de Perron-Frobenius, valeur-énergie, valeur-pollution, valeur-travail.
Citer cet article
Jean Arrous « La « boîte à outils » de l’analyse input-output de Leontief », Bulletin de l’Observatoire des Politiques Économiques en Europe, vol. 2, 1, articles à paraitre.
Qui est Leontief ?
Né à Saint Pétersbourg en 1905 et décédé à New York en 1996, Wassily Leontief est issu d’une riche famille d’industriels du textile. L’entreprise familiale est spécialisée dans la production de chintz, une toile de coton pour ameublement. Le chintz est fabriqué à l’aide de coton, de produits de teinture, de machines et de main-d’œuvre. Les machines sont importées d’Angleterre, les produits vendus pour être transformés, voire exportés. Tout lien avec les fondements mêmes de l’analyse input-output ne relève peut-être pas du pur hasard !
Leontief est admis très jeune à l’université dans une Russie qui est devenue l’Union soviétique. Ardent défenseur de la liberté d’expression, il se retrouve plusieurs fois en prison. Les interrogatoires de la police politique ont lieu la nuit. Les policiers le menacent d’un « Tu sais que l’on peut te tuer ! ». Censuré en 1925 pour un article de philosophie politique, il estime que l’Union soviétique ne lui laisse pas les mains libres pour un travail véritablement scientifique et décide d’émigrer en Allemagne, où il reste de 1925 à 1931.
Il connaît une existence très difficile, mais arrive néanmoins à soutenir en 1928 une thèse, L’économie comme circulation, d’abord sous la direction de Wernert Sombart (1863-1941), membre de la « Jeune école historique » allemande. Comme ce dernier ne comprend pas les mathématiques, il confie cette direction de thèse au mathématicien polonais L. von Bortkiewicz (1868-1931). Ce dernier est connu pour avoir « corrigé » l’erreur commise par Marx au Livre III du Capital dans la solution du problème dit de la « transformation des valeurs en prix ». On verra comment l’analyse input-output résout ce problème.
Dans sa thèse, Leontief affirme en premier lieu le primat de la technologie. Il considère en effet que les approches technologique et économique ne sont pas « mutuellement exclusives : elles partagent une relation intime, puisque nous devons comprendre le cadre technologique objectif avant de pouvoir commencer à construire une théorie du système économique » (Leontief 1991, 182).
Leontief présente en second lieu le fonctionnement de l’économie sous la forme d’un flux circulaire, « approche matérielle » dans laquelle il existe entre autres « tout un ensemble d’ingrédients qui peuvent être utilisés dans la production d’un bien particulier, et chaque bien à son tour peut être utilisé de tout un ensemble de façons (…). Ceci conduit à un système d’interrelations économiques entre les processus économiques (…). L’analyse en termes de flux circulaire prend seulement en compte ces relations qui nous permettent de revenir au point initial » (Leontief 1991, 182). « Revenir au point initial », c’est une autre manière de dire qu’il y a interdépendance, que tout dépend de tout, et réciproquement.
Leontief pense faire carrière en Allemagne. Comme la publication d’articles en allemand lui permet d’acquérir une certaine réputation, en 1931, il se rend à New York à l’invitation de Simon Kuznets (1901-1985), futur prix Nobel 1971. L’année suivante, il est recruté par l’université Harvard où il restera jusqu’à sa retraite en 1975. Devenu professeur titulaire en 1946, il fonde en 1948 le Harvard Economic Research Project.
Il part ensuite à New York où il fonde et dirige l’Institute for Economic Analysis. Il reçoit le prix Nobel en 1973 « pour ses travaux en input-output ».
Quelle est la problématique de Leontief ?
À l’automne 1921, âgé de 16 ans, Leontief entre à l’université de Petrograd (nouveau nom de Saint-Pétersbourg). Il lit beaucoup, en bibliothèque, en français, en allemand et en russe, et « fait une lecture profonde des ouvrages les plus importants en économie politique depuis le 18ème siècle » (Leontief 1984, 77-78). Il en retient que les fondateurs de la science économique moderne – Adam Smith, Ricardo, Malthus et J. S. Mill – voient l’économie nationale « comme un système autorégulé constitué d’un grand nombre d’activités différentes mais interreliées et, par conséquent, interdépendantes » (1984, 23). En 1984, Leontief déclare également qu’il a lu Quesnay mais, en ce temps-là, il « ne pense pas encore à l’input-output » (1984, 89).
Leontief date de 1931 la première formulation de la problématique de ses recherches. En 1984, il la formule ainsi : « À mon avis, l’approche globale, l’‘équilibre général’, est la seule approche théorique permettant de comprendre le système économique selon la tradition classique (…). Avec Walras, l’analyse générale est toujours très théorique. J’ai alors pensé que l’on devrait développer une formulation théorique qui puisse être appliquée d’un point de vue empirique en analysant les flux de biens » (Italiques de Leontief) (1984, 84).
Suite à un travail acharné mené avec l’aide d’un seul assistant de recherche, Leontief publie en 1936 un article où apparaissent les termes input et output pour la première fois dans l’histoire de la science économique. Dès la première phrase, la référence à Quesnay est explicite : « L’étude statistique présentée dans les pages qui suivent peut le mieux être définie comme un essai pour construire sur la base des matériaux statistiques disponibles un Tableau économique (en français dans le texte) des États-Unis pour l’année 1919 » (Leontief 1936, 105). Cet article est suivi en 1937 d’un second article où Leontief présente le modèle théorique associé à ces données. À eux deux, ces articles remplissent ainsi le programme que Leontief s’était fixé cinq ans plus tôt.
Comment Leontief met-il en application cette problématique ?
Leontief découpe l’activité économique à partir de celle de ses différentes branches. Plus précisément, il part de la production des branches et des conditions techniques de leur production. Ce point de départ de l’analyse input-output se situe ainsi véritablement au cœur de notre discipline. Or comme la production de tout output passe par l’utilisation d’un certain nombre d’inputs dont la production exige à leur tour l’utilisation d’autres inputs et ainsi de suite, le découpage opéré par Leontief met à sa façon en évidence l’interdépendance des activités économiques.
Dans son article de 1936, Leontief découpe l’activité économique des États-Unis pour l’année 1919 en 44 branches et présente, sous la forme d’un encart de 51 cm sur 66 cm, le premier tableau input-output de l’histoire de la science économique. Les développements de l’article de 1937 sont exposés à partir d’un tableau en dix branches, car entretemps Leontief a découvert la possibilité d’effectuer les calculs nécessités par les applications numériques à l’aide d’un « calculateur simultané » qui venait juste d’être inventé. Le tableau en 10 branches présenté dans l’article de 1937 est ainsi le premier tableau input-output calculable de tous les temps.
Quelle est l’hypothèse fondamentale de l’analyse input-output et quelles en sont les conséquences ?
Cette hypothèse, dite de linéarité, implique que les différents inputs d’une branche sont proportionnels à l’output de cette branche. Leontief part très vraisemblablement de l’expérience de son entreprise familiale pour considérer que « les facteurs de production individuels s’assemblent en proportions définies, et non pas en quantités aléatoires » et ajoute : « Pour tout processus de production, il existe des proportions idéales dans lesquelles les facteurs de production impliqués doivent être réunis » (Leontief 1927, 11). On peut également ajouter que cette hypothèse correspond à de faibles variations de la production, alors qu’un doublement de la production ira vraisemblablement de pair avec une réorganisation de la production. Cette hypothèse implique un ensemble de trois conséquences.
Intéressons-nous en premier lieu à la production d’une unité d’une branche donnée - par exemple la production d’une voiture - et notons les différents inputs utilisés pour la fabrication de cette voiture. Opérons de la même manière pour l’ensemble des branches, on obtient alors un tableau carré. Or, du fait de l’hypothèse de linéarité de Leontief, ce tableau s’interprète comme une matrice, une matrice carrée, qui plus est à coefficients positifs ou nuls. On pourra donc utiliser les propriétés de ces matrices telles qu’elles ont été démontrées entre 1907 et 1912 par les mathématiciens O. Perron et G. Frobenius.
En deuxième lieu, les propriétés des matrices sont indépendantes du nombre de lignes et de colonnes qu’elles comportent. Cela signifie – très grand avantage pédagogique - que la présentation théorique de l’analyse input-output pourra se faire dans le cas d’une économie comportant seulement deux branches - disons « l’agriculture » et « l’industrie » - sans déformation des résultats. Les applications empiriques pourront par contre comporter un nombre quelconque de branches, en fonction de la disponibilité des données et du niveau recherché d’agrégation.
Troisième conséquence, essentielle pour la suite : il est possible de séparer analyse en termes physiques et analyse en termes monétaires. En effet, si l’on modifie quelque peu la production des biens, les proportions des différents inputs restent les mêmes : cela implique que les coefficients technologiques et la matrice technologique ne sont pas modifiés. Comme les calculs en termes monétaires font intervenir ces dernières données, le calcul des prix et des autres éléments de l’analyse en termes monétaires n’est pas modifié.
Cette utilisation du calcul matriciel par l’analyse input-output constitue pour moi une symbiose tout à fait étonnante entre l’analyse économique et un chapitre des mathématiques dans la mesure où, on le verra, certains théorèmes du calcul matriciel comportent des résultats insoupçonnés qui ont une interprétation étonnante en termes d’analyse input-output.
Quels sont les concepts-clés de l’analyse input-output qui constituent sa « boîte à outils » ?
Les concepts-clés de cette « boîte à outils » relèvent de trois groupes spécifiques. Le premier groupe comporte la valeur-travail, la valeur-pollution et la valeur-énergie. Ces trois outils découlent directement de l’interdépendance entre les branches. Pour produire une voiture, il faut du travail direct au sein du constructeur automobile. Mais si l’on tient compte également du travail nécessaire à la production des pneus, du verre, de l’acier,… on obtient le travail indirect, et la somme des deux définit la valeur-travail de la voiture. Le principe est le même pour les deux autres valeurs. Ainsi la production de la voiture chez le constructeur peut être très peu polluante mais, si la production des pneus est extrêmement polluante, la valeur-pollution de la voiture peut s’avérer extrêmement élevée. Il en va de même pour l’énergie. La prise en compte de l’interdépendance par l’analyse input-output montre ainsi l’intérêt majeur de cette analyse pour calculer différents enjeux des transitions écologique et énergétique.
La « boîte à outils » de l’analyse input-output comporte en deuxième lieu deux graphiques qualifiés de frontières. Le premier est la frontière des possibilités de production. Connaissant la quantité totale de travail disponible dans l’économie, cette frontière nous indique les différentes quantités d’emplois finals de chacun des biens que l’on peut ainsi produire. On retrouve cette frontière au début de tous les manuels d’initiation à l’économie. L’analyse input-output va ainsi au-delà de cette simple présentation et déduit la construction de cette frontière des données physiques de la production des différents biens.
La frontière des prix des facteurs relève de la détermination des prix. Ces derniers sont qualifiés de prix d’équilibre dans la mesure où ils égalisent le prix de chaque bien à l’ensemble de ses coûts de production, coûts dans lesquels intervient un certain montant de profit. Dans ces conditions, la frontière des prix des facteurs représente la variation du salaire réel – le salaire monétaire divisé par un indice de prix – en fonction de la marge de profit. À l’inverse de la précédente, cette frontière n’apparaît pas dans les manuels d’économie alors qu’elle met en évidence de façon particulièrement nette les conditions qui président à la répartition du revenu national.
Troisième outil sorti de cette même boîte, le Tableau des entrée-sorties ou TES. Avec le Tableau économique d’ensemble, c’est l’un des deux tableaux de synthèse de la Comptabilité nationale. Ils partent tous les deux des mêmes données statistiques mais les répartissent différemment. Le premier en regroupant ces données par branches, le second en les regroupant par secteurs institutionnels. Les deux parviennent bien entendu au même résultat quant à la valeur du PIB, le Produit intérieur brut.
Comment se présentent l’analyse en termes physiques, l’analyse en termes monétaires ?
Le calcul matriciel montre ici toute sa forte analytique. Alors que, dans l’algèbre traditionnelle, la variable $$$x$$$ désigne un unique élément, dans le calcul matriciel, la matrice $$$X$$$ désigne un ensemble de $$$n$$$ variables.
Dans le cas de l’analyse input-output en termes physiques, ces $$$ n$$$ variables sont les quantités totales des $$$n$$$ biens produits dans l’économie et la matrice $$$X$$$ est par convention une matrice uni-colonne. La matrice technologique des conditions de production des différents biens est une matrice carrée $$$ A$$$ à coefficients positifs ou nuls, elle comporte $$$n$$$ lignes et $$$ n$$$ colonnes. Les règles du produit matriciel sont telles que le produit $$$AX$$$, matrice uni-colonne, représente l’ensemble des emplois intermédiaires nécessaires à la production de $$$X$$$.
Quand on déduit de la production totale $$$X$$$ les emplois intermédiaires $$$AX$$$, on obtient la matrice uni-colonne $$$Y$$$ des emplois finals des différents biens. Cette relation s’écrit donc sous la forme : $$$Y=X - AX$$$, équation matricielle qui permet de déduire les emplois finals de la connaissance de la matrice technologique $$$A$$$ et de celle de la matrice $$$X$$$ des productions totales de chacun des biens. Cette équation matricielle s’écrit également :
qui représente la première équation fondamentale de l’analyse input-output. La production totale est la somme des emplois intermédiaires et des emplois finals.
L’intérêt majeur de l’analyse input-output pour la politique économique réside toutefois dans la possibilité de résoudre le problème inverse, à savoir le passage des emplois finals $$$Y$$$ à la production totale $$$X$$$. Par simple manipulation des éléments de l’équation matricielle $$$Y = X - AX$$$, on obtient la deuxième équation fondamentale de l’analyse input-output :
dans laquelle $$$[ I – A ]^{- 1}$$$ est la matrice inverse de Leontief. $$$I$$$ désigne la matrice identité associée au nombre de lignes et de colonnes de la matrice $$$A$$$.
Les théorèmes de Perron et Frobenius montrent que les coefficients de cette matrice inverse sont bien positifs ou nuls. Si ce n’était pas le cas, il serait toujours possible, moyennant un choix judicieux des emplois finals $$$Y$$$, d’obtenir des productions totales négatives de certains biens, ce qui n’a pas de sens économique.
À ce stade, désignons par $$$L$$$ la matrice uni-ligne des entrées-travail (en hommes $$$×$$$ années) nécessaires à la production d’une unité de chaque bien. Dans de telles conditions, l’emploi total $$$t$$$ associé à la production $$$X$$$ s’écrit :
De la prévision concernant les emplois finals futurs Y>, on déduit le niveau de l’emploi dans chacune des branches ainsi que l’emploi total par la relation :
De l’équation précédente, extrayons la quantité $$$L[ I - A]^{-1}$$$ : elle s’interprète comme la valeur-travail des différents biens produits dans l’économie. La matrice uni-ligne L des entrées-travail correspond aux entrées directes, la matrice uni-ligne $$$L[ I - A]^{-1}$$$ tient compte des entrées-travail directes et indirectes nécessaires à la production unitaire nette de chacun des biens. Telle est l’expression de l’un des concepts-clés de l’analyse input-output.
De plus, dans le cas où l’économie ne produit que deux biens, l’équation précédente est celle d’une droite, la frontière des possibilités de production, qui est décrite au début de tous les manuels d’initiation à l’économie comme représentative de la rareté, en l’espèce la rareté du travail. Désignons par $$$ v_1$$$ et $$$v_2$$$ les valeurs-travail des deux biens telles qu’elles viennent d’être définies et $$$ y_1$$$ et $$$ y_2$$$ l’emploi final de chacun des biens, l’équation de cette droite est :
L’équation de cette frontière est ainsi directement liée aux différentes conditions de production des biens.
Venons-en maintenant à la détermination des prix. Désignons pour cela par $$$ P$$$ la matrice uni-ligne des prix des différents biens. La valeur des consommations intermédiaires par unité produite de chacun des biens s’écrit $$$ PA$$$. Désignons par $$$w$$$ le salaire monétaire, le coût salarial de la production unitaire des différents biens s’écrit : $$$ wL$$$. De la sorte, le total des coûts de production unitaire de chaque bien est défini par $$$ PA + wL$$$.
Soit $$$ ƛ$$$ la marge de profit prélevée sur l’ensemble de ces coûts, le profit par unité produite s’écrit : $$$ ƛ (PA + wL)$$$. Notons que si la marge de profit n’est prélevée que sur les seuls coûts en biens intermédiaires, soit $$$ ƛ PA$$$, les calculs sont du même type, seuls les résultats numériques seront différents.
Pour chaque bien, les prix d’équilibre sont définis par leur égalité à l’ensemble des coûts unitaires de production. Pour l’ensemble des biens, on a donc :
Après arrangement des termes, on obtient :
Telle est la troisième équation fondamentale de l’analyse input-output. Les prix d’équilibre dépendent ainsi du salaire monétaire $$$ w$$$ de la marge de profit $$$ ƛ$$$ et des conditions de la production, représentées par la matrice technologique A et la matrice uni-ligne des entrées-travail $$$L$$$. La matrice $$$ (1+ ƛ) A$$$ est qualifiée de matrice augmentée de Leontief et, de la même manière, la matrice $$$ (1 + ƛ) L$$$ est la matrice augmentée des entrées-travail.
La formulation de cette équation montre également qu’il n’est pas possible de passer des valeurs-travail $$$L [I – A]^{-1}$$$ en hommes $$$×$$$ années aux prix $$$P$$$ en termes monétaires, comme le fit Marx à propos de la « transformation des valeurs en prix ». Il est seulement possible de passer de la matrice augmentée des entrées-travail $$$(1 + ƛ) L$$$ aux prix $$$P$$$, moyennant le taux de salaire monétaire $$$w$$$ et la matrice augmentée de Leontief $$$(1+ ƛ) A$$$.
Pour que les prix d’équilibre existent et soient positifs, toute la question est maintenant de savoir si la matrice $$$ [ I - (1+ ƛ) A]$$$ est inversible et si son inverse est à coefficients positifs ou nuls. Les théorèmes de Perron et Frobenius donnent une réponse positive à ces deux questions, du moins tant que la marge de profit $$$ ƛ$$$ est comprise entre une valeur nulle et une valeur maximale $$$ƛ_m$$$ que je qualifie de taux de marge structurel. Cette valeur ne dépend en effet que de grandeurs caractéristiques de la matrice technologique $$$A$$$, en l’espèce elle est liée à la « valeur propre dominante » de cette matrice. Ainsi, selon l’état du rapport de forces entre salariés et capitalistes, la marge de profit varie entre les deux extrêmes d’une valeur nulle et d’une valeur maximale déterminée par les conditions physiques de la production.
Venons-en à la frontière des prix des facteurs qui représente la variation du salaire réel en fonction de la marge de profit. Dans le cas d’une économie à deux biens, prenons le prix $$$p_1$$$ (le prix du « bien agricole ») pour définir le niveau de vie. La frontière des prix des facteurs est alors une courbe qui représente les variations du salaire réel $$$ w/p_1$$$ en fonction de la marge de profit $$$ƛ$$$. On montre que son équation ne dépend que des éléments de la matrice technologique, des entrées-travail et de la marge de profit.
Une fois les prix déterminés, la présentation de l’analyse input-output s’achève sur l’élaboration du dernier concept-clé, du dernier outil de cette analyse, à savoir le Tableau des entrées sorties. Revenons pour cela à l’ensemble des données de l’activité économique en termes physiques, et regroupons tous les emplois intermédiaires et tous les emplois finals dans un tableau qualifié de Tableau des échanges interindustriels. Il suffit alors de multiplier les éléments de la première ligne de ce tableau par le prix d’équilibre du premier produit, les éléments de la deuxième ligne par le prix d’équilibre du deuxième produit,… et l’on obtient ainsi le Tableau des entrées-sorties en termes monétaires.
Quelle application à la transition écologique ?
Dès 1970, soit deux ans avant la publication du rapport Meadows, Les limites à la croissance, Leontief a publié un article pour montrer la façon d’intégrer la pollution à l’analyse input-output (Leontief, 1970). L’apport majeur de son article est d’arriver à prendre en compte ce bien « négatif » que constitue la pollution : si elle est émise à l’occasion de la production, elle n’augmente pas pour autant le bien-être des consommateurs finals.
L’article de Leontief décrit une économie qui ne comporte que deux agents : les ménages et les entreprises. Ces dernières produisent deux biens – « agricole » et « industriel » - en émettant chacune dans l’atmosphère un même polluant solide. Ce polluant est éliminé par l’activité d’une troisième branche, la branche antipollution. Le polluant représente ainsi un produit intermédiaire, et l’activité de la branche antipollution cherche à en réduire l’emploi final.
La même hypothèse de linéarité s’applique comme précédemment, et l’on construit ainsi une matrice technologique $$$A^*$$$ généralisée au cas de la pollution. On en déduit la pollution directe et indirecte par unité d’emploi final de chacun des biens : c’est la valeur-pollution de chacun des biens.
La difficulté majeure de la prise en compte de la pollution est donc qu’elle constitue un bien « négatif ». Le problème a été résolu par Leontief en partant des conditions d’équilibre des quantités physiques, généralisées au cas de la pollution, à savoir :
Il se trouve que la formulation algébrique de la troisième équation de cette égalité matricielle – équation relative au polluant – s’exprime comme la différence entre la quantité de polluant déversée dans l’atmosphère et la quantité de polluant éliminée par la branche antipollution et s’écrit : $$$-y_3$$$. Cette quantité s’interprète comme le montant de polluant non éliminé, c’est-à-dire comme le niveau toléré de pollution, qui est par définition positif. La quantité $$$y_3$$$ est donc négative et doit être reportée comme telle dans les calculs correspondants. Connaissant le niveau toléré de pollution, on déduit le Tableau des échanges interindustriels dans lequel sont inscrits toutes les données physiques de cette économie : consommations intermédiaires, entrées-travail, pollution de chacune des branches, emplois finals,…
Je généralise pour ma part la présentation de Leontief en étudiant deux cas de niveau toléré de pollution au lieu d’un cas par Leontief, cela permet de montrer l’incidence de la lutte antipollution sur l’activité économique. À chacun de ces niveaux, j’associe trois modalités de financement au lieu de deux par Leontief : elles vont du financement intégral par les ménages au financement intégral par les entreprises en passant par l’élimination par les entreprises de la moitié de la pollution qu’elles engendrent. La présentation de ces trois cas met en évidence les enjeux socio-économiques des politiques environnementales : faire financer la lutte antipollution par les ménages ou par les entreprises ne présente pas le même enjeu en termes de politique économique et d’acceptation de cette politique.
Le lien entre dépollution et emploi est infiniment plus complexe que le lien linéaire introduit par Leontief dans son modèle et la pollution ne se réduit pas à la seule émission de polluants solides. Il n’en demeure pas moins que le fait de pouvoir séparer détermination des quantités physiques et détermination des prix – du fait de l’hypothèse de linéarité de Leontief – permet de cerner l’incidence respective des normes de lutte antipollution et des modalités de financement de cette lutte sur les résultats d’ensemble de l’activité économique, qu’il s’agisse de la production, de l’emploi, des prix ou de la structure des prix relatifs.
Quelle application à la transition énergétique ?
La préoccupation relative à l’énergie et à son rôle dans l’activité économique remonte, comme pour l’environnement, au début des années 1970, mais pour des raisons différentes. L’activité économique devenait de plus en plus dépendante aux sources d’énergie pétrolière, et le premier choc pétrolier en 1973 a accéléré la prise de conscience de cette dépendance tant pour les décideurs politiques que pour les chercheurs.
Ces derniers ont donc cherché à étendre le modèle de base de l’analyse input-output en lui ajoutant un ensemble de coefficients linéaires de façon à calculer l’intensité énergétique, la valeur-énergie des différents biens, somme de l’énergie directe consommée par la production d’un bien et de l’énergie indirecte consommée par l’obtention de ses différents inputs. C’est ainsi la somme de l’énergie utilisée par la chaîne de montage du constructeur automobile et de l’énergie dépensée pour produire les pneus, le verre, l’acier,…
Dans les lignes et les colonnes de la matrice technologique, on trouve maintenant, à côté des différents biens, les différentes catégories d’énergie utilisées pour les produire. De la matrice technologique ainsi définie, on déduit la matrice inverse de Leontief et, de cette dernière, on extrait la sous-matrice des valeurs-énergie des différents biens.
À cela vient s’ajouter une spécificité de la prise en compte de l’énergie. Certaines branches – par exemple, le pétrole brut, le charbon, l’énergie solaire – interviennent en amont du processus productif, on parlera d’énergie primaire. D’autres branches, tel le pétrole raffiné, ont l’énergie primaire comme input, énergie qu’elles convertissent en énergie secondaire. On sera ainsi conduit à s’intéresser à la question de la conservation de l’énergie entre une énergie primaire donnée et les énergies secondaires qui lui correspondent.
Numériquement la conservation de l’énergie implique que, dans la colonne relative à un bien, la valeur-énergie de la source d’énergie primaire, par exemple le pétrole brut, est la somme des valeurs-énergie des autres biens énergétiques, par exemple le pétrole raffiné et l’électricité.
Depuis la fin des années 1970, une autre méthode pour intégrer l’énergie dans le modèle de base de l’analyse input-output s’est développée. Cette méthode, en termes d’unités hybrides, consiste à exprimer les flux d’énergie en unités d’énergie et les flux non énergétiques en termes monétaires. Ces unités physiques sont par exemple les BTU, les British Thermal Units. Cette unité anglo-saxonne d’énergie permet ainsi d’homogénéiser les différentes sources d’énergie. Les partisans de cette méthode considèrent qu’elle ne vient pas supplanter la méthode traditionnelle. Mais elle facilite d’abord les applications empiriques et présente ensuite l’intérêt de se conformer à « des conditions de conservation de l’énergie » auxquelles la méthode traditionnelle se conforme « seulement si les prix de l’énergie sont uniformes dans l’ensemble des branches qui en consomment » (Miller et Blair 2009, 401).
Quel bilan tirez-vous de l’analyse input-output ?
Premier élément de ce bilan : l’analyse input-output remplit pleinement le programme de recherche que Leontief s’était fixé, à savoir « développer une formulation théorique qui puisse être appliquée d’un point de vue empirique en analysant les flux de biens ». Élément essentiel de cette formulation : elle part de la production, sachant que tout le reste en découle à travers la productivité de l’économie.
Le second élément se mesure à l’aune des concepts mis en avant par cette analyse. Dans l’analyse en termes physiques, ils s’appellent respectivement : coefficients technologiques, technologie de Leontief, matrice technologique, matrice inverse de Leontief, processus de Leontief, tableau des échanges interindustriels, frontière des possibilités de production, valeur-travail, valeur-pollution, valeur-énergie. À ces concepts s’ajoutent ceux de l’analyse en termes monétaires : prix d’équilibre, matrice augmentée de Leontief, marge de profit et taux de marge structurel, tableau input-output, répartition du revenu national entre salaires et profits, frontière des prix des facteurs.
En dépit de son évidente ampleur, cette analyse n’a pas la prétention de se constituer en principe universel d’explication. Cela se constate d’abord dans l’analyse de la production : la quantité de travail disponible est largement déterminée par des données d’ordre démographique. Le choix entre les emplois finals des différents biens est un choix de société dans lequel interviennent non seulement les ménages et les entreprises mais également l’État. Ensuite le niveau de la marge de profit est déterminé par le rapport de forces au sein de la société. Ce niveau est resté relativement stable durant les Trente Glorieuses. Suite à la révolution néolibérale de Margaret Thatcher en 1979 et de Ronald Reagan en 1980, il s’est établi à une valeur bien supérieure qui s’impose maintenant à l’international, au travers notamment des délocalisations. Enfin, les choix relatifs au niveau toléré de pollution, au financement de la lutte antipollution et à l’utilisation de l’énergie, sont largement conditionnés par l’intervention de l’État en termes de législation et de réglementation. Ces différentes possibilités de choix sont autant de portes ouvertes sur la pluridisciplinarité.
Quels sont les autres développements de l’analyse input-output ?
L’analyse input-output ne se limite pas à ce que je viens d’exposer. Depuis les articles fondateurs de Leontief en 1936/1937, elle a été développée dans de multiples directions. En effet, pour Leontief, l’approche input-output n’est pas seulement une théorie formelle, celle exposée au début de cet entretien, elle est également une stratégie de recherche, celle exposée à propos des transitions écologique et énergétique.
Cette stratégie a donné lieu à des développements considérables. Je citerai tout d’abord ceux de Leontief. Dès 1953, il s’est intéressé au changement structurel, à l’analyse dynamique et à l’analyse interrégionale. Étudiant le commerce international des États-Unis, il est parvenu la même année à des résultats empiriques contraires aux affirmations de la théorie du commerce international. Qualifiés de paradoxe de Leontief, ces résultats ont donné lieu à une littérature considérable (Leontief 1953).
En 1977, avec A. Carter et P. Petri, Leontief a publié pour le compte des Nations-Unies un modèle multirégional de l’économie mondiale, traduit en français avec pour titre 1999, l’expertise de Wassily Leontief (Leontief, Carter et Petri 1977). L’objectif volontariste de cette étude était de « réduire d’ici l’an 2000 l’écart entre pays riches et pays pauvres en accélérant le développement de ces derniers, tout en préservant l’environnement et les équilibres naturels » (4ème de couverture). La conclusion de l’étude est que « rien n’est joué, ce sera difficile, mais c’est possible. À condition toutefois que des réformes sociales et politiques soient mises en œuvre dans les pays pauvres, et que des modifications importantes interviennent dans l’ordre économique international, ce qui présuppose un changement d’attitude des pays riches » (id.). C’est écrit en 1977, nous sommes en 2025…
Leontief a poursuivi sur son « primat de la technologie », posé dès son doctorat de 1928, en s’intéressant également au chômage technologique, du fait du remplacement des hommes par des machines. D’abord optimiste sur ce point, il a changé d’avis en 1996, considérant que les technologies futures tendront à réduire le rôle du travail humain dans le processus de production. Selon lui, une telle réduction implique la nécessité d’un changement significatif du système social passant par des transferts de revenus.
Dans les travaux entrepris par d’autres, nous trouvons ceux de Richard Stone, prix Nobel 1984. Il a développé les matrices de comptabilité nationale qui élargissent l’analyse input-output. Viennent ensuite les modèles d’équilibre général calculable, le modèle INFORUM de Clopper Almon, la Statistical Decomposition Analysis. De plus, presque tous les modèles économiques importants contiennent des sous-modèles substantiels de type input-output. Dans le cas de la France, ce fut le cas de DMS, le Modèle Dynamique Multisectoriel de l’INSEE, de 1987 : son intitulé même faisait référence à l’analyse input-output.
Pour achever cette énumération, j’ajoute que 85 articles majeurs des différents domaines de l’analyse input-output ont été rassemblés en 1998 par Kurz, Dietzenbacher et Lahr dans un ouvrage de près de 1 500 pages au total… (Kurz, Dietzenbacher et Lahr (eds.) 1998).
Quel est selon vous le sommet de l’analyse input-output ?
Ce sommet tient pour moi à l’existence du taux de marge structurel. Revenons pour cela à la frontière des prix des facteurs et partons d’une valeur nulle de la marge de profit. La valeur ajoutée est alors intégralement attribuée aux salariés et l’on calcule une certaine valeur des prix d’équilibre des produits. Augmentons maintenant la marge de profit, les prix d’équilibre sont modifiés à la hausse. Le revenu national est maintenant partagé entre salaires et profits, et la part des profits augmente en même temps que la marge de profit. Toute la question est alors de savoir s’il existe une valeur maximale de la marge de profit, auquel cas l’intégralité du revenu national est attribuée aux capitalistes et les salariés ne reçoivent rien. Tels sont les deux extrêmes du spectre de la répartition du revenu national.
Le sommet de l’analyse input-output tient à ce que la valeur maximale de la marge de profit, le taux de marge structurel – grandeur monétaire - est en fait déterminé par les conditions physiques de la production. En termes techniques, le taux de marge structurel est calculé à partir de la seule valeur propre dominante de la matrice technologique associée aux conditions physiques de la production dans les différentes branches.
J’illustrerai un tel sommet de la façon suivante. Le moteur d’une voiture possède un certain nombre de caractéristiques techniques : puissance, accélération, consommation,… En fonction de ces caractéristiques techniques, les ingénieurs déterminent le nombre maximal de tours par minute du moteur qu’il est bon de ne pas dépasser, sinon le moteur va physiquement exploser. Dans le cas de l’analyse input-output, l’analogie s’exprime ainsi : au-delà du taux de marge structurel, l’économie « explose », car elle n’est plus suffisamment productive pour être en mesure de satisfaire aux exigences des capitalistes en termes de marge de profit.
Pourquoi avez-vous été attiré par l’analyse input-output ?
À moins d’en être contraint, le choix d’un domaine de recherche est de la même nature que le choix amoureux. « Parce que c’était lui, parce que c’était moi », disait Montaigne à propos de La Boétie. On peut ensuite trouver des justifications à posteriori de ce choix. Pour ma part, je me suis trouvé très tôt en connivence avec Leontief et son analyse input-output qui abordait l’économie d’un point de vue global et rendait compte de l’interdépendance des activités économiques tant d’un point de vue théorique que d’un point de vue empirique. Et si je remonte plus loin, beaucoup plus loin dans mon existence, lors de mon passage par les classes préparatoires aux grandes écoles j’ai absorbé de très fortes doses de mathématiques. Le seul chapitre qui me soit resté en mémoire au point de pouvoir rédiger mon ouvrage sans ouvrir un manuel de mathématiques, c’est le chapitre exposant le calcul matriciel ! La connivence avec Leontief n’eut pas besoin d’être analysée : c’était bien lui et c’était moi. Il me suffisait alors de rester sur les pas de ce grand monsieur au prix Nobel largement mérité.
Références bibliographiques
Leontief W. W. (1927), « Über die Theorie und Statistik der Konzentration », Jahrbücher für Nationalökonomie und Statistik, vol.126, mars, pp.301-311. Traduction anglaise : « The Theory and Statistical Description of Concentration », reproduite dans Leontief, Essays in Economics. Theories, Facts and Policies, vol.2., Basil Blackwell, Oxford, 1977, chap.2, 10-23.
Leontief W. W. (1928), « Die Wirtschaft als Kreislauf », Archiv für Sozialwissenschaft und Sozialpolitik, 60, pp.577-623. Traduction anglaise partielle dans Leontief 1991.
Leontief W. W. (1936), « Quantitative Input and Output Relations in the Economic System of the United States », The Review of Economics and Statistics, vol.18, n°3, 105-125.
Leontief W. W. (1937), « Interrelation of Prices, Output, Savings and Investment : A Study in Empirical Application of Economic Theory of General Interdependence », The Review of Economics and Statistics, vol.19, n°3, august, 109-132.
Leontief W. W. (1953), « Domestic Production and Foreign Trade : The American Capital Position Reexamined », Proceedings of the American Philosophical Society, vol. 97, n°4, September, 332-349.
Leontief W. W. (1970), « Environmental Repercussions and the Economic Structure : An Input-Output Approach », The Review of Economics and Statistics, vol.52, 262-71 ; trad. fr. 1971, « L’environnement et la structure économique », Analyse et Prévision, vol.3, 253-276.
Leontief W. W. (1984), Itinéraire. Entretien avec Bernard Rosier, in Rosier (dir.) 1986, Wassily Leontief. Textes et itinéraire, La Découverte, 75-122.
Leontief W. W. (1991), The Economy as a Circular Flow, Structural Change and Economic Dynamics, vol. 2, n°1, p.181-212. Traduction partielle de Leontief 1928.
Leontief W. W. & Carter A. & Petri P., (1977), The Future of the World Economy, New York, Oxford University Press ; trad. fr., 1999 : l’expertise de Wassily Leontief : une étude de l’ONU sur l’économie mondiale future, Paris, Dunod, 1977.
Kurz H. & Dietzenbacher E. & Lahr M. (eds.) (1998), Input-Output Analysis, Elgar.
Miller R. E. & Blair P. D. (2009), Input-Output Analysis. Foundations and Extensions, Second Edition, Cambridge University Press.