Annexe : motion de politique économique au Congrès de Montreux (août 1947)

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« Annexe : motion de politique économique au Congrès de Montreux (août 1947)  », Bulletin de l’Observatoire des Politiques Économiques en Europe, vol. 15, 29 - 31, Hiver 2006.

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Devant les conséquences tragiques et le coût énorme qu’entraînent pour les différents États de l’Europe la guerre, sa préparation et ses suites, résultats inévitables du principe de la souveraineté inconditionnée des États ;

devant la diminution considérable des niveaux de vie qui résulte des obstacles opposés artificiellement par les États souverains à la haute division internationale du travail ;

devant l’impossibilité d’accéder à la démocratie économique qu’entraîne fatalement l’application par chaque Etat du principe de souveraineté absolue ;

L’UNION EUROPÉENNE DES FÉDÉRALISTES DÉCLARE :

  1. Il n’est pas d’autre solution efficace aux problèmes économiques et sociaux qui assaillent l’Europe que l’institution d’une fédération économique, impliquant l’abandon d’une partie des pouvoirs économiques détenus actuellement par les États souverains à une autorité fédérale.
  2. Toute organisation centralisée et totalitaire de l’économie est absolument incompatible avec les objectifs fondamentaux du fédéralisme.
  3. Pour être compatible avec ces objectifs toute organisation économique doit :
    • reposer sur une décentralisation radicale des pouvoirs économiques à tous les échelons ;
    • favoriser au maximum la division et la spécialisation du travail, ainsi que l’initiative des individus et des groupes :
    • réaliser une planification des structures, dans un sens convenable, notamment dans les domaines de la monnaie et du crédit, de l’organisation des marchés des biens, des capitaux et du travail, de l’assurance contre le chômage, les accidents professionnels, les maladies et la vieillesse, de l’instruction générale et professionnelle, de l’urbanisme,etc.
    • de permettre, tout particulièrement, de procéder à la définition des produits et des services, à leur rationalisation et à l’homologation de leurs qualités, à l’amélioration des conditions de travail, à l’organisation collective de certaines recherches, à la diffusion de l’information économique, à la neutralisation des tendances monopolistiques, quelles
      qu’elles soient, etc.
  4. Une telle organisation économique fondée sur l’action autonome et libre des individus et des entreprises dans le cadre d’une économie de marché associée à une planification des structures assurant une répartition équitable des revenus et la suppression de tout revenu ne correspondant pas à un service présent ou passé rendu à la collectivité, conjugue les avantages fondamentaux d’une économie de marché et ceux d’une action consciente de la collectivité, action conduite suivant un plan tendant à réaliser une économie à la fois plus efficace et plus juste.
  5. La fédération économique ainsi constituée doit pouvoir, dans le plus bref délai, favoriser la libre circulation des marchandises, des capitaux et des hommes indispensables à la réalisation du haut niveau de vie que permettent actuellement les progrès de la technique.
  6. La réalisation de ces objectifs fondamentaux ne saurait être immédiate, en raison des localisations et des spécialisations industrielles actuelles, des degrés différents d’équipement industriel, des niveaux de vie inégaux et des modes d’organisation économique distincts, qui caractérisent la situation présente de l’Europe.
  7. Pour surmonter ces obstacles des mesures de transition doivent être prévues.
  8. Ces mesures de transition ne peuvent être effectivement et efficacement mises en application que si les efforts réalisés tendent vers une fédération à la fois économique et politique, car il serait absolument utopique de penser que des tentatives d’accords économiques réciproques entre Etats souverains pourraient à elles seules conduire à une véritable union fédérale européenne.
  9. La fédération économique nécessite, à tous les échelons, une organisation et une diffusion systématique de l’information.
  10. Compte tenu des objectifs ci-dessus, les pouvoirs économiques délégués à l’autorité fédérale doivent être limités, mais ils doivent comprendre, sans préjudice des compétences réservées aux organismes universels :
    • le droit de réglementer les conditions monétaires ;
    • le droit de légiférer en matière de commerce intérieur (c’est-à-dire à l’intérieur de la Fédération) et extérieur ;
    • le droit de légiférer en matière de mouvements de capitaux tant à l’intérieur qu’à l’extérieur ;
    • le droit de prendre les mesures transitoires destinées à assurer, dès que possible, la libre circulation des citoyens de l’Union Fédérale à l’intérieur de la Fédération ;
    • le droit de légiférer en matière de circulation des hommes lorsqu’elle comporte le franchissement des limites de la Fédération (émigration et immigration) ;
    • le droit de réglementer les conditions de production et de commerce des armements et de l’énergie atomique, dans le cadre des accords internationaux de portée universelle ;
    • le droit de lever les impôts nécessaires au fonctionnement de l’Union Fédérale et à l’exécution des grands travaux d’intérêt général ;
    • le droit de traiter toutes les questions économiques relatives aux groupes associés d’outre-mer ne possédant pas le statut d’État souverain.
  11. Chaque État fédéré conserve tous les droits qui ne sont pas explicitement transférés à l’autorité fédérale et, en tout cas, tous les droits dont l’exercice ne risque pas d’avoir des répercussions sur les autres États fédérés.
  12. Ces principes d’organisation économique sont compatibles avec les solutions collectives, à condition que celles-ci ne soient pas contraires à l’esprit et aux méthodes du fédéralisme. Seule l’expérience peut en fait décider laquelle des deux formes de propriété, privée ou collective, est, dans l’actuel de l’évolution politique et économique des peuples, la plus efficace dans chaque secteur.
  13. Les avantages que rendrait possibles la fédération économique de l’Europe sont immenses, et ils permettraient, dans l’espace de quelques années, non seulement de reconstruire les régions dévastées, mais également d’augmenter considérablement les niveaux de vie actuels des populations européennes.
  14. L’extension du champ d’application des principes ci-dessus à un domaine plus vaste que la fédération européenne est éminemment souhaitable.

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