Rien de neuf sur la politique monétaire et pourtant ...
Michel Dévoluy, Université de Strasbourg (BETA).
Le traité constitutionnel reconduit à l’identique la politique monétaire de la zone euro. Pourtant, l’indépendance de la BCE et son objectif radical de stabilité des prix ont été souvent critiqués : comment expliquer une telle continuité ?
Mots-clefs : Traité Constitutionnel , Banque centrale européenne (BCE), gouvernance économique et financière en Europe, objectifs de la Banque centrale européenne, Système des banques centrales européennes, Traité de Maastricht, traités européens.
Citer cet article
Michel Dévoluy « Rien de neuf sur la politique monétaire et pourtant ... », Bulletin de l’Observatoire des Politiques Économiques en Europe, vol. 12, 19 - 23, Printemps 2005.
Le nouveau Traité reconduit la politique monétaire de la zone euro instaurée à Maastricht en 1992. Le cadre institutionnel, l’objectif de stabilité des prix et, plus généralement, les missions de la Banque centrale européenne (BCE) demeurent pratiquement inchangées. Cette continuité s’appuie sur les mêmes choix doctrinaux. Il est donc possible d’apprécier leurs pertinences à la lumière des performances de la zone euro depuis 1999, date de la création de la monnaie unique. Si les grands principes demeurent, la BCE et la zone euro profitent néanmoins de quelques clarifications mineures, notamment au regard de l’intégration des nouveaux membres. Au total, et malgré des attentes fortes de changements en matière de politique monétaire, il n’y a hélas rien de vraiment neuf …
1. La reconduction de choix doctrinaux contestables
L’objectif de stabilité des prix et l’indépendance de la BCE sont les deux fondements de la construction monétaire européenne. On les retrouve dans le nouveau Traité. Cette continuité repose à la fois sur des convictions doctrinales et sur la satisfaction du devoir accompli par la BCE depuis la création de l’euro.
La doctrine
L’objectif de stabilité des prix reste central, on le retrouve plusieurs fois dans le Traité. La Convention avait omis de l’introduire explicitement dans l’article qui expose les objectifs de l’Union. Cette absence a été pointée par la BCE. Et l’oubli fut réparé dans le texte définitif agréé par la Conférence intergouvernementale (art. 1-3). On le voit, la stabilité des prix demeure fermement le but premier assigné à la politique monétaire : il prévaut sur tout (art. III-177). « Si certains membres de la Convention » écrit la BCE, « ont proposé d’élargir l’objectif principal, la grande majorité d’entre eux a néanmoins rejeté cette idée. Ils ont estimé que le mandat actuel de poursuite de la stabilité des prix comme objectif principal était fondé sur un large consensus parmi les responsables de la politique économique et les économistes, comme le reflète le traité de Maastricht … » [1]. Le Traité n’a pas tenu compte des critiques appelant à un élargissement des objectifs de la politique monétaire vers la croissance et l’emploi. Dans ce domaine, le texte ne s’inspire pas de la banque centrale américaine (la Fed) dont l’efficacité de sa politique est souvent prise en exemple.
Le triomphe du monétarisme strict est ici éclatant. Selon cette école, une progression trop forte de la circulation monétaire au regard de la croissance potentielle de l’économie a un seul effet certain : la hausse des prix. Il est vain d’espérer faire évoluer le taux de chômage par une action monétaire car l’économie tend toujours à se caler sur son niveau de chômage naturel.
Le monétarisme tourne résolument le dos aux enseignements keynésiens sur la stabilisation macroéconomique de court terme. Pour le courant keynésien, les forces du marché ne conduisent pas automatiquement, et dans un délai raisonnable, vers un niveau d’emploi acceptable socialement et politiquement. Il faut donc agir, en particulier en activant une politique monétaire expansionniste.
L’objectif de stabilité des prix est présenté comme une évidence fondatrice de la constitution monétaire de l’UE. « Son importance pour la création de l’UEM ne saurait être surestimée, dit encore la BCE, dans la mesure où elle constitue la base sur laquelle ce projet a été élaboré. Les pères fondateurs de l’UEM étaient convaincus que seul le fait d’accorder à la stabilité des prix une priorité explicite pouvait garantir l’existence d’une monnaie unique forte et stable. » Le nouveau Traité persiste à clore radicalement un débat de fond sur les enjeux de la politique monétaire. Il ferme la porte à tous ceux qui souhaitent un élargissement des objectifs prioritaires de la politique monétaire. Le Traité constitutionalise une politique particulière, l’approche monétariste, alors que d’autres politiques monétaires devraient pouvoir émerger des choix démocratiques des citoyens européens.
L’indépendance de la BCE est totalement préservée dans le Traité. Ce statut doit lui permettre d’exercer la mission de stabilisation des prix sans avoir à subir des pressions politiques ou sociales qui pourraient la divertir de son objectif prioritaire. D’un point de vue plus technique, les économistes de la « nouvelle école classique » justifient la nécessité d’une banque centrale indépendante à travers la notion de crédibilité. Pour être crédible en matière d’inflation, une banque centrale doit mener une politique cohérente au cours du temps. Il s’agit de persuader les agents économiques que la banque centrale ne déviera pas de son objectif affiché de stabilité des prix. Le meilleur moyen d’assurer cette crédibilité est l’indépendance face au pouvoir politique. Il faut priver celui-ci de la tentation de créer « par surprise » de l’inflation pour relancer l’économie. Ces analyses ont légitimé le statut de la BCE lors de sa création. Il est repris dans le nouveau Traité. Par hypothèse, les gouvernements démocratiques perdent ainsi tout contrôle sur la politique monétaire.
Le cadre général des politiques de change de la zone euro a lui aussi été reconduit. Ces politiques reposent à la fois sur la BCE et sur le Conseil des ministres garant de la logique intergouvernementale (art. IIl-185 et art. IIl-326). On a d’un côté une institution de nature fédérale et, de l’autre, des États souverains responsables au niveau international. Cette coexistence a des incidences importantes. Toutes les décisions concernant un régime de change officiel de l’euro vis-à-vis de monnaies tierces sont de la responsabilité des États membres, c’est-à-dire du Conseil. Suivant la même logique, il est dans les attributions du Conseil de formuler des orientations générales de politique de change. Mais les choix et les avis du Conseil ne doivent jamais entraver l’objectif de stabilité des prix poursuivi par la BCE, en toute indépendance. Tout ceci posé, c’est la BCE qui opère sur les marchés des changes en appliquant sa stratégie monétaire. La complexité de cette architecture a deux effets. Elle crée une attraction pour un euro fort, rempart contre l’inflation importée, mais qui handicape la compétitivité internationale de la zone. Elle contrarie l’émergence d’une politique de change lisible, comme le montre un certain flou sur la question du niveau approprié de l’euro face au dollar depuis maintenant plus de six années. Il manque un gouvernement unique pour représenter l’euro sur la scène internationale.
Les résultats
Puisque rien ne change dans la doctrine, l’expérience de la politique monétaire menée par la BCE depuis 1999 peut nous servir de guide pour apprécier la portée future des propositions constitutionnelles.
Pour répondre aux exigences du Traité, la BCE a axé toute sa stratégie monétaire sur la stabilité des prix. L’entreprise était difficile compte tenu des diversités nationales. Sa politique devait être unique, lisible, crédible et efficace. Nous n’entrerons pas ici dans les détails des procédures et des instruments qu’elle a choisis [2]. Soulignons cependant son impressionnante réussite technique, reconnue de tous.
Pour accomplir sa mission, la BCE s’est fixé comme objectif de maintenir l’inflation, sur le moyen terme, à moins de 2% par an. Cet engagement est considérable et sans précédent. Il s’applique depuis le 1 janvier 1999. La décision de la BCE du 8 mai 2003 de conduire l’inflation à des niveaux proches de 2% à moyen terme n’a rien changé sur le fond.
Ce choix stratégique d’un taux de référence très bas empêche la BCE de s’intéresser à autre chose qu’à l’inflation. Pour appuyer sa mission, elle soutient explicitement toutes les politiques qui défendent la rigueur budgétaire. De ce point de vue, les contraintes imposées par le Pacte de stabilité et de croissance renforcent objectivement la stratégie de la BCE.
Cette politique de répression massive de l’inflation formate de plus en plus les esprits et les comportements. Elle pousse sans discernement à une maîtrise des salaires et à la flexibilité sur le marché du travail. Elle tend à valider sans distance critique toutes les formes de concurrence favorables à la baisse des prix, y compris la concurrence fiscale. Elle jette parfois la suspicion sur les services publics en mobilisant des critères de rentabilité et d’efficience qui négligent trop l’intérêt collectif.
Certes, les méfaits de l’inflation sont connus et ne doivent pas être négligés. Elle est un facteur d’inefficacité économique du fait des distorsions des prix relatifs ; elle entraîne une augmentation des primes de risques dans les contrats ; elle perturbe la gestion des encaisses réelles ; elle est injuste en agissant sur la répartition des revenus et des patrimoines.
Néanmoins, fixer de façon systématique un objectif très bas freine le dynamisme économique. En effet, une déflation est aisément possible dans certains secteurs et les situations de baisses relatives des revenus réels deviennent plus lisibles. Par ailleurs, le taux de 2% est une moyenne qui méconnaît les disparités dans la zone euro et qui pourrait s’avérer compatible avec une situation déflationniste dans un État membre. La vertu monétaire, lorsqu’elle est radicale, a ses limites.
La détermination d’un taux d’inflation optimal est une question controversée chez les économistes. La réponse de la BCE paraît bien rigide, même si on peut comprendre sa volonté initiale en 1999 de construire sa crédibilité. Mais rien n’a changé depuis et en reproduisant le texte initial, le nouveau Traité valide cette stratégie monétaire et, en même temps, le retrait du politique.
L’inflation dans la zone euro s’est située en moyenne légèrement au-dessus de 2%. On pourrait critiquer la BCE à la vue des résultats. Mais cela serait abusif et incohérent par rapport à nos analyses. En définitive, la BCE a bien rempli ces obligations en la matière.
Par contre, nous devons constater les faibles performances économiques de la zone euro, surtout par rapport aux États-Unis. Outre-atlantique, la croissance est nettement plus forte depuis 1999 (à l’exception de la forte récession de 2001) et le chômage est presque deux fois moindre. Ces résultats décevants interpellent, surtout au regard de la réactivité de la politique monétaire américaine lorsque la conjoncture se déprime. Bien sûr, la monnaie n’est pas responsable de tout. Il est entendu que les politiques conjoncturelles ne peuvent pas, à elles seules, soutenir l’économie sur un sentier de croissance qui maintiendrait le chômage à un niveau satisfaisant pour la société. Mais nous pensons que le nouveau Traité fait fausse route en persistant à fixer à la BCE un objectif qui limite la politique monétaire au seul combat contre l’inflation. La politique économique européenne devrait pouvoir choisir d’autres priorités.
2. Des modifications somme toute mineures
Quelques articles du Traité concernent la BCE, tandis que sa présentation détaillée, comme dans les textes actuels, se trouve dans un protocole. Nous utiliserons donc à la fois le Traité et le Protocole de 51 articles pour évoquer les modifications. Certaines s’inscrivent dans la démarche de clarification des textes, en particulier face à l’élargissement de l’UE, d’autres abordent la question de la gouvernance économique de la zone euro.
Quelques clarifications
Le Traité améliore la lisibilité et la cohérence institutionnelle de l’Union. Sous cette perspective, la BCE est concernée sur trois points.
- Le Titre IV de la première partie du Traité, qui présente les organes et les institutions de l’Union, distingue le cadre institutionnel (Parlement européen, Conseil européen, Conseil des ministres, Commission, Cour de justice) des autres institutions et des organes consultatifs où on trouve, notamment, la BCE (art. 1-30). En établissant cette distinction le Traité confirme le statut sui generis de la BCE. Elle est définie comme une institution, dotée de la personnalité juridique, qui exerce ses pouvoirs en toute indépendance, et qui possède un pouvoir réglementaire afin de conduire ses missions.
- L’article 1-30 reprend la définition du Système européen de banques centrales (SEBC) constitué de la BCE et des banques centrales nationales (BCN) de tous les Etats membres de l’UE. La nouveauté est l’introduction de L’Eurosystème qui comprend la BCE et les BCN des Etats de la zone euro. Certes, l’Eurosystème existe dans le vocabulaire de la BCE depuis le lancement de l’euro. Mais il n’avait pas encore de statut dans les traités.
- Jusqu’ici, les six membres du Directoire de la BCE étaient désignés « d’un commun accord » entre les gouvernements nationaux. Désormais, ils sont choisis par un vote à la majorité qualifiée des membres du Conseil (art. III-382 et art. 11 des statuts de la BCE). Cette nouvelle procédure s’aligne sur une règle générale de l’UE en la matière.
Le Traité prépare au bon fonctionnement d’une Union élargie. Pour la zone euro, l’enjeu est de préserver l’efficacité décisionnelle de la BCE malgré l’augmentation du nombre des participants à l’Eurosystème. Le Conseil des gouverneurs est l’organe qui arrête la politique monétaire unique lors de ses réunions régulières. Il est formé des gouverneurs des BCN et des membres du Directoire. Un trop grand nombre de votants dans ce Conseil induit un système de décisions peu réactif où il est plus difficile de converger vers une position commune. La politique monétaire devient alors moins efficace. Sur la base de cette analyse, le Traité a changé les modalités de vote du Conseil des gouverneurs. La voie avait déjà été ouverte dans le traité de Nice en permettant une modification des statuts de la BCE par le Conseil, sur proposition de la BCE [3].
Le nouveau mécanisme de vote reprend les propositions du Conseil formulées en 2003 [4]. Elles s’inspirent assez largement du fonctionnement de la Fed où quatre Banques fédérales sur onze votent à travers un système de rotation, tandis que les sept membres du Directoire (Board of Governors) plus la Banque fédérale de New York votent toujours. Mais la BCE est plus attentive que la Fed à une représentation équitable des États en fonction de leurs poids.
La solution adoptée est assez compliquée, elle repose sur plusieurs principes. Le nombre maximum de votants est de vingt et un, c’est-à-dire quinze gouverneurs de BCN et les six membres du Directoire. Ainsi, les gouverneurs susceptibles de voter ne dépassent pas quinze, c’est-à-dire le nombre des États membres avant l’élargissement du 1° mai 2004. Avec leurs voix permanentes, les membres du Directoire apparaissent clairement comme les représentants de la zone euro. Pour respecter cette règle, des groupes d’États de poids comparables sont constitués, avec un système de vote par rotation pour chaque groupe [5]. Les décisions continuent d’être prises à la majorité simple, avec une voix prépondérante pour le président de la BCE en cas de partage des voix. Dans ce système, la BCE fonctionne dans une logique fédérale.
Vers une gouvernance de la zone euro ?
La présence dans le chapitre « politique économique et monétaire » d’une nouvelle section, formée de trois articles, sur les « dispositions propres aux États membres dont la monnaie est l’euro » semble ouvrir des perspectives. La spécificité de la zone euro est marquée, et on peut donc s’attendre à la possibilité de mettre en place des politiques appropriées. Mieux, cela pourrait être l’amorce d’une véritable gouvernance économique pour la zone euro.
- Désormais, au sein du Conseil, les États membres de la zone euro peuvent décider de renforcer la coordination et la surveillance de leur discipline budgétaire. Ils peuvent également élaborer des orientations de politique économique qui leurs sont propres (art. III194). Dans la pratique il s’agirait, pour le premier point, d’intensifier des mécanismes coercitifs qui existent déjà, comme les procédures de surveillance multilatérale et le Pacte de stabilité et de croissance. La portée du deuxième point est elle aussi limitée, le nouveau texte précisant que les orientations propres à la zone euro devront être conformes aux grandes orientations des politiques économiques (GOPE). Introduites à Maastricht, celles-ci concernent l’Union dans son ensemble. Par conséquent, la soumission aux GOPE constitue une forte contrainte. En somme, les marges de manœuvre propres à la zone euro restent très encadrées.
- Le nouveau Traité reconnaît officiellement l’Eurogroupe (art. III-195) créé par le Conseil européen de décembre 1997. Ses modalités de fonctionnement sont précisées dans un protocole de deux articles. Depuis sa mise en place, cette instance permet aux ministres des États membres de la zone euro de se rencontrer sur des sujets d’intérêt commun touchant la monnaie unique. La Commission participe aux réunions, la BCE est invitée. Les réunions sont informelles. Ce n’est pas un gouvernement économique de la zone euro. Et rien ne change dans le nouveau texte, sauf sur un point. Dorénavant, l’Eurogroupe est doté d’un président élu pour deux ans et demi, à la majorité, par les ministres des États membres de la zone euro. Cet aspect est intéressant car il assure plus de lisibilité et plus de continuité dans les affaires débattues par les ministres. D’ailleurs, avant même le début des procédures de ratification du Traité, le premier ministre luxembourgeois Jean-Claude Juncker a déjà été désigné pour cette fonction au le 1er janvier 2005.
La présence de l’Eurogroupe traduit un besoin, ressenti depuis le début, d’une forme de gouvernance macroéconomique pour la zone euro. Mais sur le fond, le texte ne va pas vraiment dans cette direction. En particulier, toute combinaison de la politique monétaire unique et des politiques budgétaires (le policy mix) en vue d’agir sur le niveau de l’activité économique demeure impossible. Ceci est en parfaite résonance avec la doctrine monétaire présentée plus haut, et qui s’accompagne d’une logique de surveillance multilatérale en matière budgétaire.
Pourtant, de nombreux débats ont eu lieu sur ce thème. Ils ont débuté dès les discussions sur le traité de Maastricht. Depuis lors, l’impossible policy mix européen a été critiqué par ceux qui croient à l’efficacité de l’interventionnisme économique et à la nécessité d’un gouvernement économique. D’ailleurs, déjà pour Maastricht, certains ont mobilisé le vote « non » afin de dénoncer les limites de l’architecture des politiques économiques. Le troisième article (art. III-196) aborde la représentation internationale de la zone euro. On retrouve ici la doctrine de la politique de change et du rôle du Conseil dans ce domaine. Nous savons que le Conseil reste maître des choix politiques. C’est lui qui conclut les accords formels, mais il peut confier à la BCE la représentation de la zone euro au sein des instances monétaires internationales. Cet aspect montre que la zone euro continue d’être représentée par les gouvernements plutôt que par un gouvernement. On retrouve de nouveau la question éminemment politique du choix entre l’intergouvernemental et le fédéral.
Conclusion
La politique monétaire voulue par le traité de Maastricht et reprise dans le nouveau texte a réussi. Depuis 1999, la stabilité des prix a été maintenue en moyenne sur la zone euro. Ce résultat est conforme à l’orthodoxie monétariste renouvelée par le courant des nouveaux classiques. Cette fermeté, d’inspiration très libérale, constitutionalise le retrait total du politique en matière monétaire. Elle dénie l’efficacité du policy mix. De fait, elle dégage la BCE de toute responsabilité pour soutenir l’activité économique et l’emploi. Cette doctrine peut déboucher sur un coût social élevé. Il suffit de penser au chômage et à ses conséquences politiques. Un traité constitutionnel ne devrait pas priver une société démocratique d’un des instruments de la politique conjoncturelle au nom d’une priorité radicale en matière de stabilité des prix.
Bibliographie
Artus P. et Wyplosz C. (2002), La banque centrale européenne, Rapport du Conseil d’analyse économique n° 38, La Documentation française.
Cahiers français, (2004), mars-avril, Euro et gouvernance économique, La documentation française.
Dévoluy M., (2000), La Banque centrale européenne, Que sais-je ? n° 3552, PUF.
[1] « La constitution européenne et la BCE », Bulletin mensuel de la BCE, août 2004, p. 58. 2 Cit. p. 57.
[2] Voir : La Politique monétaire de la BCE, BCE 2004 : La Banque centrale européenne, Michel Dévoluy, Que sais-je No 3352, PUF, 2000
[3] Un alinéa 6 a été introduit à l’article 10 afin de pouvoir modifier l’alinéa 2 qui fixe les modalités de vote.
[4] Ces décisions datent du 21 mars 2003. Elles ont déjà été présentées dans le N° 8 de ce Bulletin (Été 2003) ; voir également « L’adaptation des modalités de vote au sein du Conseil des gouverneurs », Bulletin mensuel de la BCE, mai 2003
[5] Pour la constitution des groupes, le poids de chaque pays dépend de deux critères : la part de son PIB dans la zone euro et la part du bilan agrégé de ses institutions financières et monétaires par rapport à la somme des bilans. Les pondérations de ces deux critères sont respectivement de 5/6 et 1/6. Entre seize à vingt et un États deux groupes sont constitués : Le groupe des cinq États possédant les poids les plus élevés et un groupe comprenant tous les autres membres. Le premier groupe dispose de quatre voix, le deuxième de onze voix. Le total des voix des gouverneurs reste donc à quinze. À partir de vingt deux États, trois groupes sont constitués : le groupe des cinq, avec quatre voix, le deuxième groupe, avec huit voix, est constitué de la moitié du nombre total des gouverneurs, arrondi si nécessaire au nombre entier supérieur, le troisième groupe comprend les autres gouverneurs, avec trois voix. Le total reste à quinze. Au sein de chaque groupe les gouverneurs disposent de leur droit de vote pour une durée identique.
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