L’inflation par les superprofits dans la zone euro
Gilbert Koenig, Université de Strasbourg (BETA)
Le taux d’inflation de la zone euro (ZE) a augmenté d’une façon importante avec la reprise économique qui a suivi le confinement imposé par la gestion de la crise sanitaire, puis avec l’invasion de l’Ukraine. Il a ensuite baissé sensiblement en 2023. Cette évolution est généralement attribuée en grande partie à celle des prix des produits énergétiques et alimentaires qui dépend de celle des coûts et des profits des entreprises qui les produisent. Or, les profits ont beaucoup augmenté dans les grandes entreprises qui disposent d’un pouvoir de marché leur permettant de fixer leurs prix de ventes, particulièrement dans certains secteurs, comme l’énergie et l’alimentation. Ils sont largement supérieurs à ceux obtenus avant la crise sanitaire. Ces excédents sont considérés comme des superprofits. L’article propose, dans une première étape, de définir le concept de superprofit qui est a priori assez flou et de spécifier les sources de ce type de profit. Il montre ensuite l’influence négative des superprofits sur l’inflation. Celle-ci se traduit par une boucle profits-prix qui alimente une spirale inflationniste. L’article montre que cette boucle qui existe déjà à l’heure actuelle est plus préoccupante que la boucle salaires-prix dont l’émergence éventuelle fait l’objet des craintes de beaucoup de gouvernements. Les incidences des superprofits sur l’inflation ont conduit à diverses propositions et applications de systèmes de taxation des superprofits. Les recettes fiscales que ces systèmes peuvent générer sont susceptibles de rendre moins rigoureuses les politiques budgétaires des pays de la ZE. Par contre, la rigueur de la politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE) peut être renforcée par l’importance des superprofits.
Codes JEL : D43, E31, E52, E62, L13.
Mots-clefs : boucle profits-prix, inflation, politique monétaire, superprofit, taxation des superprofits.
Citer cet article
Gilbert Koenig « L’inflation par les superprofits dans la zone euro », Bulletin de l’Observatoire des Politiques Économiques en Europe, vol. 48, 1, Hiver 2023.
Au cours de la période 2009-2021, le taux d’inflation annuel moyen de la ZE est resté d’abord à un niveau stable, proche de 2 %, puis il a atteint des valeurs plus faibles, voire négatives. Cette situation a pris fin en 2021 avec la reprise économique qui a suivi la fin du confinement total ou partiel imposé par la gestion de la crise sanitaire. Cette reprise est caractérisée par une hausse importante de la demande macroéconomique. Cette hausse n’a pas pu être satisfaite entièrement par les producteurs. En effet, certains de leurs coûts non-salariaux ont commencé à augmenter sensiblement et leur activité a été limitée par les goulots d’étranglement provoqués par la rupture de certaines chaînes d’approvisionnement. Selon Eurostat, le taux d’inflation annuel de la ZE a augmenté progressivement à partir de mars 2021 pour atteindre le niveau record de 5,9 % en février 2022. [1] Ce record a été battu en mars 2022 par un taux annuel de 7,4 % à la suite de l’invasion de l’Ukraine en février 2022. Ce taux a continué à augmenter jusqu’à 9,6 % en décembre 2022. Après être resté proche de ce niveau pendant deux mois, il a diminué progressivement pour se stabiliser à 5,3 % en juillet et à 5,2 % en août avant de baisser d’une façon importante à 4,3 % en septembre 2023, à 2,9 % en octobre et à 2,4 % en novembre.
La hausse du taux d’inflation annuel de la ZE à partir de mars 2021 et sa baisse en 2023 sont attribuées essentiellement à l’évolution des prix des produits alimentaires et des coûts de production fortement impactés par les prix de l’énergie et de certains intrants hors énergie. Une partie des prix de ces déterminants est fixée par de grandes entreprises qui disposent d’un pouvoir de marché et qui, de ce fait, sont en mesure de générer des profits considérés comme excessifs sans craindre une perte de débouchés. Ces profits ont augmenté d’une façon importante dans certains secteurs, notamment dans ceux des produits énergétiques et de l’alimentation. Ils sont largement supérieurs à ceux obtenus avant le début de la période inflationniste 2021-2022. Ces excédents sont considérés comme des superprofits qui, en augmentant notamment les prix des produits alimentaires et énergétiques, alimentent l’inflation. Mais le concept de superprofit est assez flou. En effet, ce profit ne possède pas une définition et une mesure faisant l’objet d’un consensus. Cet article propose dans une première étape, de mieux cerner ce concept et de voir comment, dans la pratique, on spécifie les superprofits pour analyser leurs effets sur l’inflation et pour constituer une base pour une taxation éventuelle. Il est alors possible de préciser les sources des superprofits et d’analyser leur influence négative sur l’inflation. Cette influence se traduit par une boucle profits-prix qui alimente une spirale inflationniste. Son importance semble être sous-estimée dans la ZE. En effet, les responsables économiques et politiques européens sont plutôt préoccupés par la crainte de la résurgence d’une boucle salaires-prix analogue à celle qui a existé dans les années 1970 et dont la probabilité de se reproduire à l’heure actuelle est faible. Le développement des superprofits a conduit à différentes propositions ou application de systèmes de taxation des profits excessifs générés par les grandes entreprises opérant dans certains secteurs, comme celui de l’énergie. Les recettes fiscales résultant de ces systèmes peuvent réduire la rigueur des politiques budgétaires envisagée pour assainir les finances publiques. Par contre, l’importance des superprofits peut accentuer la rigueur de la politique monétaire imposée par la nécessité pour la BCE d’atteindre son objectif inflationniste de 2 %.
1. Recherche d’une définition des superprofits
Le concept de superprofit peut être envisagé sous différents angles. Par exemple, dans une perspective éthique, un superprofit peut être considéré par l’opinion publique comme un revenu non mérité qu’il faut condamner au nom de la morale, alors que dans une optique politique il est vu sous l’angle de ses effets négatifs sur la distribution des revenus qu’il convient de corriger par une taxation. Pour les économistes, le superprofit n’est pas un concept théorique. Ils lui préfèrent la notion de rente. En fait, le superprofit est un concept assez flou. En effet, il ne possède pas une définition qui fait consensus. Les difficultés de définir les superprofits qui résultent de ce flou conduisent parfois à douter de leur existence. C’est ainsi que le ministre français de l’économie a déclaré lors de l’université d’été du Medef du mois d’août 2022 qu’il ne savait pas ce qu’était un superprofit.
Mais, même s’il est difficile de définir un superprofit, il existe des indices qui permettent de prendre conscience de l’existence de profits excessifs. De tels indices sont notamment fournis par la distribution généreuse de dividendes opérée par les grands groupes et par l’importance des rachats par les entreprises de leurs propres actions en pleine période de forte inflation. Des exemples de ces indices sont fournis par les performances des grandes sociétés du CAC 40 [2] relevées par l’Observatoire des Multinationales (2023). Ces sociétés ont versé 57 milliards d’euros de dividendes en 2021 et 67 milliards en 2022. Aux dividendes distribués en 2022 s’ajoutent 25 milliards d’euros de rachats par les entreprises de leurs propres actions au bénéfice de leurs actionnaires et 26 milliards en 2021 contre 11,1 milliards en 2019. L’ensemble des dividendes et des rachats d’actions représente 92 milliards d’euros en 2022, ce qui correspond à une augmentation de 61 % par rapport à 2019. Les montants de ces opérations effectuées en 2022 résultent des profits de 138 milliards d’euros, ce qui représente une hausse de 74 % par rapport aux profits réalisés en 2019.
Les cinq grandes sociétés retenues dans le tableau (1) participent en 2022 à 44 % des dividendes distribués par les sociétés du CAC40 et à 41 % des rachats de leurs actions. Leurs profits représentent près de 50 % de ceux obtenus par ces sociétés.
En milliards d’euros
Entreprises | Dividendes | Rachats d’actions | Total | Profits |
TotalEnergies | 10,0 | 7,2 | 17,2 | 19,1 |
LVMH | 6,0 | 1,6 | 7,6 | 14,1 |
Stellantis | 4,2 | 0,9 | 5,1 | 16,8 |
BNP Parisbas | 4,8 | 0 | 4,8 | 10,2 |
Sanofi | 4,5 | 0,5 | 5,0 | 8,4 |
Source : Observatoire des Multinationales (ODM).
D’après ces exemples, on peut considérer que la hausse des dividendes et des rachats d’actions observée en 2021 et 2022 qui est largement supérieure à celle de ces opérations effectuées en 2019, constitue des indices satisfaisants de l’existence de superprofits réalisés par les grandes sociétés du CAC40 dans un contexte de forte inflation. Mais ces indices sont insuffisants pour permettre une évaluation incontestable des montants de ces profits excessifs, car il n’existe pas une définition du superprofit unanimement acceptée. Si on se limitait à une perspective purement économique on pourrait rapprocher le concept de superprofit du concept théorique de rente. Ce rapprochement pourrait aboutir à la définition d’un concept théorique qui satisferait surtout les économistes, mais qui n’entraînerait pas une adhésion générale, car il privilégierait le contenu économique du concept et écarterait de ce fait ses aspects éthiques, politiques et sociologiques.
Malgré ces difficultés, il est nécessaire, dans la pratique, de mesurer l’importance des superprofits, notamment pour avoir une base pour leur taxation. Généralement, l’évaluation actuelle de leurs montants résulte de la comparaison de ceux obtenus en période de crise et en période normale. Cette méthode a été retenue par diverses institutions, comme la Commission européenne, qui annonce une taxation des superprofits sous la forme d’une contribution temporaire de solidarité. Dans cette optique, les superprofits désignent des revenus qui sont considérés comme supérieurs à la normale et qui résultent de comportements spécifiques des décideurs et/ou de circonstances extérieures aux entreprises
2. Les origines des superprofits
Les superprofits peuvent avoir deux origines : l’une se trouve dans les stratégies de prix de certaines entreprises et l’autre est formée par un choc externe à l’entreprise.
Les stratégies de prix des grandes entreprises dans les secteurs de l’industrie agroalimentaire, de l’énergie, des transports, des services marchands et de certains secteurs industriels peuvent engendrer des superprofits. En effet, ces entreprises peuvent répercuter, en tant que price makers (faiseuses de prix), toute la hausse de leurs coûts de production sur leur prix de vente. Cela leur permet de protéger leurs profits, ce qui est généralement considéré comme normal. Dans ce cas, les prix et les profits augmentent comme les coûts. Mais, les entreprises peuvent aussi profiter de leur pouvoir de marché et d’un contexte inflationniste pour répercuter sur leurs prix une hausse plus importante que celle de leurs coûts. Avant d’adopter une telle stratégie, elles s’assurent généralement que leurs concurrents vont utiliser la même politique et qu’elles conservent ainsi leur part de marché, ce qui peut se réaliser par des ententes implicites ou explicites (Weber et Wasner,:h,k 2023). Ces comportements génèrent des superprofits.
De tels profits peuvent également résulter de chocs externes. C’est ainsi que le déclenchement du conflit russo-ukrainien a constitué pour la ZE un choc externe qui a entrainé une hausse importante du prix de l’énergie. Cette hausse a permis aux entreprises du secteur de l’énergie de dégager mécaniquement des profits exceptionnels. Ces profits sont considérés comme des superprofits, car ils résultent d’une aubaine et non d’une décision de gestion. De plus, ils ne bénéficient qu’à un secteur, alors que ceux utilisant l’énergie comme intrant dans la production de leurs biens subissent une diminution de leurs bénéfices ou des pertes.
Le confinement a également permis à certaines entreprises d’acquérir un pouvoir de marché temporaire. C’est le cas de celles qui, au moment du confinement, étaient les seules à pouvoir faire des ventes en ligne et qui pouvaient ainsi répondre à la demande de biens provenant de leurs clients et de ceux des entreprises n’ayant pas les possibilités techniques pour effectuer des ventes en ligne. Les vendeurs en ligne ont ainsi acquis un pouvoir de marché temporaire grâce à un choc externe qui a entraîné un confinement et qui a écarté les entreprises concurrentes. Cela leur a permis d’imposer un prix supérieur à celui fixé dans la situation normale de concurrence, ce qui a généré des superprofits.
Les superprofits résultant de ces deux sources ont déclenché une boucle profits-prix qui alimentent l’inflation actuel. La réalité d’une telle boucle est parfois contestée et souvent sous-estimée. C’est ainsi que les responsables politiques et économiques de la ZE semblent plutôt préoccupés par la crainte d’une boucle salaires-prix qui pourrait résulter d’une hausse excessive des salaires, mais dont la probabilité de réalisation semble faible à l’heure actuelle.
3. La crainte d’une boucle salaires-prix
Pendant les périodes de forte inflation, comme celle des années 1970, on considérait généralement qu’une hausse des coûts de certains intrants non salariaux de la production, comme les matières premières, obligeaient les entreprises à augmenter leurs prix, ce qui suscitait des réactions de la part des salariés en vue de protéger leurs pouvoirs d’achat. Pour cela, ils exigeaient et obtenaient souvent une augmentation de leurs revenus au moins aussi forte que celle de l’inflation. Il en résultait un nouvel accroissement des coûts de production et des prix qui, à son tour, suscitait des hausses de salaires. Cela engendrait une boucle salaires-prix qui alimentait une spirale inflationniste. L’émergence d’une telle boucle a été favorisée au début des années 1970 par l’existence de systèmes d’indexation des salaires sur l’inflation et par les fortes revendications des syndicats encouragées par le mécontentement social suscité par les effets de l’inflation sur le pouvoir d’achat. Or, le système d’indexation des salaires a été abandonné depuis plusieurs années par la majorité des pays de la ZE [3]. De plus, même s’ils font face à une inflation comparable à celle des années 1970, les syndicats européens actuels ont probablement un pouvoir de négociation plus faible que ceux des années 1970, car le taux de syndicalisation dans la ZE est passé depuis cette période de 43 % à 23 % des salariés. De plus, les syndicats ne semblent pas être poussés par un mécontentement social général suffisamment important pour les inciter à revendiquer une indexation complète des salaires par rapport à l’inflation ou une hausse des salaires supérieure à l’inflation. En effet, l’exigence d’un rattrapage important de la perte de pouvoir d’achat peut être atténuée par le souvenir des mesures prises par la plupart des pays de la ZE consistant à prendre en charge une partie du manque à gagner des entreprises et des ménages [4].
Malgré ces changements, la BCE craint toujours qu’en s’efforçant de rattraper leur manque à gagner résultant de la forte inflation de 2021 et 2022, les salariés déclenchent une boucle salaires-prix préjudiciable pour l’inflation. Mais, même si un tel rattrapage était envisagé, il mettrait trois ans, selon la présidente de la BCE, pour arriver à son terme dans des circonstances analogues à celles de la période actuelle. (Lagarde, 2023), Il est possible que cette durée soit encore plus longue et que le rattrapage ne soit que partiel. En effet, le pouvoir de négociation des syndicats qui est déjà assez réduit à cause de la faiblesse du taux de syndicalisation risque d’être encore plus limité dans une période de faible croissance et de haut niveau de chômage qui risque de résulter des politiques monétaires et budgétaires restrictives menées et prévues dans la ZE.
Le risque d’une spirale inflationniste alimentée par une boucle salaires-prix encore peu visible semble actuellement peu important. Par contre la boucle profits-prix influence déjà à l’heure actuelle l’évolution de l’inflation de la ZE.
4. L’existence d’une boucle profits-prix
La boucle profits-prix qui semble être sous-estimée par les responsables politiques et les médias, est alimentée par les superprofits résultant des stratégies de prix de nombreuses grandes entreprises qui opèrent dans divers secteurs économiques. Dans la période 2021-2022 caractérisée par une hausse continue des prix de l’énergie [5] et de certains intrants hors énergie du processus de production, ces entreprises répercutent sur leurs prix, de période en période, un montant supérieur à la hausse de leurs coûts. L’accentuation de la hausse de l’inflation à chaque période entraîne une nouvelle hausse des profits qui se répercute à son tour sur l’inflation. Il en résulte une boucle profits-prix qui alimente une spirale inflationniste.
La hausse de l’inflation de la période 2021-2022 dépend directement pour près de 50 % de celle du prix de l’énergie et de celle des prix alimentaires pour une grande partie des 50 % restants (BCE, 2023). Une partie des hausses des prix ayant conduit à l’augmentation de l’inflation résulte des politiques de prix conduisant à des superprofits, notamment dans le secteur alimentaire et dans les secteurs de la production et d’utilisation d’énergie. Cette incidence a été particulièrement forte à partir du second semestre 2022 (Schnabel, 2023).
La baisse de l’inflation annuelle entre mars et novembre 2023 est attribuée en partie au freinage de la hausse des prix des produits alimentaires et surtout à la baisse du prix de l’énergie. C’est ainsi que, selon Eurostat (2023c), la part de l’énergie dans l’inflation totale de novembre a diminué de 11,5 % contre 11,2 % en octobre. Cette part a augmenté moins qu’en octobre dans les secteurs des produits alimentaires (6,9 % au lieu 7,4 %), des services (4 % au lieu de 4,6 %) et des biens industriels hors énergie (2,9 % au lieu de 3,5 %).
L’évolution des prix dans la ZE a subi l’influence des comportements des grandes entreprises qui disposent d’un pouvoir de marché et qui ont tendance à ne pas répercuter les baisses de leurs coûts et de continuer à générer des superprofits. L’existence de ces superprofits a probablement freiné les incidences de la baisse de certains prix, comme ceux des produis alimentaires. De plus, elle explique, au moins partiellement, le maintien de l’indice des prix à la consommation à un niveau élevé, bien que son taux de croissance diminue sensiblement en 2023.
Une autre explication de la baisse de l’inflation se trouve dans le renforcement de la politique monétaire restrictive de la BCE. En effet, celle-ci a augmenté son taux directeur principal de 3 % en février 2023 à 4,25 % en juillet et à 4,5 % en septembre. La hausse importante de ce taux dans une durée aussi réduite a pu se transmettre plus rapidement sur les crédits et l’activité économique que ne l’estimait le vice-président de la BCE en affirmant que la durée de la transmission des effets de la politique monétaire était au moins d’un an. En effet, la politique monétaire rigoureuse accompagnée par une politique budgétaire restrictive a contribué au ralentissement de la croissance dès 2023 [6]. Par contre, la baisse de l’inflation qui en a résulté se répartit sur 2023 et les deux années suivantes, selon de Guindos (2023). La hausse du taux d’intérêt directeur accentue donc les incidences de la baisse des prix de l’énergie sur l’inflation en 2023 et atténue l’effet des superprofits sur l’inflation.
Les stratégies de prix des grandes entreprises qui génèrent des superprofits n’ont pas seulement des incidences sur le niveau et l’évolution de l’inflation dans la ZE. Elles influencent également la répartition des revenus. En effet, elles détériorent cette répartition à l’intérieur du secteur des entreprises dont les unes sont des « gagnantes » grâce à leurs superprofits et les autres sont des « perdantes », car elles n’ont pas réussi à répercuter suffisamment la hausse de leurs coûts sur les prix. Elles détériorent également la répartition entre les revenus du capital et du travail, dans la mesure où les salaires augmentent moins que l’inflation [7]. Une telle détérioration peut d’ailleurs se manifester, même en l’absence de superprofits. En effet, si les entreprises se contentent de répercuter leurs coûts sur leurs prix, la hausse de leurs profits est égale au taux d’inflation, alors que l’augmentation des salaires est inférieure à celle de ce taux, ce qui entraine une baisse de leur pouvoir d’achat. Cette baisse touche particulièrement les salariés qui perçoivent des revenus modestes et dont les budgets comportent une part importante consacrée à l’achat de produits alimentaires. En effet, l’inflation dans le secteur alimentaire était de 15,4 % en mars 2023 pour une inflation totale de la ZE de 6,9 %. Bien que l’inflation alimentaire ait diminué en septembre, elle représente toujours plus que le double de l’inflation de la ZE comme en mars 2023.
Comme les superprofits sont considérés comme des sources d’inflation, les gouvernements sont incités à les taxer et à utiliser les recettes fiscales en résultant pour corriger le déséquilibre entre les « gagnants » et les « perdants » de la crise de l’énergie et pour améliorer l’état de leurs finances publiques.
5. La taxation des superprofits
Les autorités publiques n’ont pas les moyens d’intervenir directement sur les politiques de prix des grandes entreprises et d’éviter ainsi l’émergence des superprofits. Elles pourraient cependant utiliser des systèmes de taxation suffisamment dissuasifs pour inciter les entreprises à adopter des politiques de prix moins inflationnistes. Quant aux recettes générées par ces taxations, elles pourraient permettre d’envisager une correction, au moins partielle, des effets négatifs des enrichissements excessifs sur la distribution des revenus. De plus, elles permettraient de répondre aux nombreux besoins nouveaux qui sont en train d’émerger dans l’espace européen.
Un certain nombre d’États de l’Union Européenne, comme la Grèce, la Roumanie et la Hongrie ont introduit des taxes temporaires sur les superprofits des producteurs d’électricité. De telles taxes ont également été instaurées sur les superprofits des banques par l’Espagne et l’Italie. Quant à la France, elle s’oppose fermement à une telle imposition même pour les entreprises de l’énergie dont les superprofits sont généralement les plus ciblés par les États favorables à la taxation [8]. Cette décision traduit la volonté gouvernementale de ne pas augmenter la pression fiscale, notamment sur les entreprises, car, selon le ministre français de l’économie, « taxer plus en France, c’est produire moins en France » [9]. Cette conception est partagée par le Sénat qui a rejeté un projet de taxation des superprofits en novembre 2023.
Des systèmes de taxation des superprofits sont également préconisés par des organismes internationaux, comme le FMI et l’OCDE. Dans la ZE, la Commission européenne a proposé l’instauration d’une contribution de solidarité temporaire de 33 % sur les bénéfices excédentaires qui proviennent des activités dans les secteurs du pétrole, du gaz, du charbon et du raffinage et qui dépassent de 20 % les profits moyens des trois années précédentes, considérés comme normaux.
Les systèmes de taxation des superprofits réalisés sont complétés par des contrôles du niveau de la concurrence qui, s’il est faible dans certains secteurs, favorise les stratégies générant des profits indus. Ces profits peuvent être considérés comme des superprofits, dans la mesure où il résulte de la différence entre les profits générés dans le respect de la concurrence et ceux issus de son non-respect. Ces contrôles sont assurés dans chaque pays par des autorités de la concurrence. C’est ainsi que l’Autorité française de la concurrence tente d’enrayer le développement de ces profits qui se traduit par l’évolution des taux de marge. Pour cela, elle sanctionne les entreprises qui s’entendent sur les prix ou qui abusent de leurs positions dominantes avec des pratiques nuisibles pour leurs clients ou leurs fournisseurs. B. Coeuré, président de cette autorité, affirme en 2023, que son institution a imposé environ 700 millions d’euros de sanctions par an au cours de ces dix dernières années. Il ajoute que ce résultat pourrait être largement amélioré si son institution disposait de plus de moyens (Coeuré, 2023).
Les systèmes de taxation des superprofits comportent des difficultés d‘application, comme celles concernant la définition de la période de référence pour le calcul des profits normaux et celles relatives à l’imposition des profits dans un contexte de fuite des capitaux vers les paradis fiscaux. Certaines de ces difficultés pourraient être évitées par une taxation ponctuelle de l’augmentation de la capitalisation boursière des entreprises qui ont profité des circonstances particulières des périodes 2021-2023 pour s’enrichir (Zucman et al., 2023). Cette taxation qui porte, dans cette proposition, uniquement sur les entreprises énergétiques, comporte des avantages par rapport à celle portant directement sur les superprofits. A la différence des superprofits, la capitalisation boursière peut être définie sans ambiguïté et sa hausse ne peut pas être évitée par des fuites vers des paradis fiscaux. Elle peut se substituer temporairement à l’imposition des superprofits, par exemple pour les entreprises qui bénéficient d’une valorisation boursière importante avant de dégager un profit imposable. Mais l’imposition des superprofits devrait être maintenue, car certaines entreprises peuvent dégager des superprofits importants tout en bénéficiant d’une hausse faible de leur capitalisation boursière. Les auteurs de cette proposition prévoient un taux d’imposition de 33 % appliqué à 100 % de la hausse excessive de la capitalisation boursière des entreprises énergétiques ayant leur siège social en Europe. Pour les entreprises non européennes qui ont effectué des ventes dans l’Union Européenne, la hausse de la capitalisation boursière pourrait être répartie entre les pays européens en fonction des ventes effectuées par ces entreprises dans chacun de ces pays.
Des propositions ont été effectuées pour élargir le champ d’application de la taxation des superprofits et des hausses de la capitalisation boursière. En effet, la plupart des systèmes de taxation se limitent à certains secteurs comme l’énergie et le secteur bancaire et aux plus grandes entreprises y opérant. Or, il conviendrait de ne pas se limiter à de telles mesures, car des profits excessifs peuvent aussi être générés par d’autres entreprises et dans d’autres secteurs que ceux visés généralement. Si ces dispositions consistaient à appliquer une taxation forte à tous les profits et à tous les accroissements de capitalisation boursière excessifs, elles pourraient constituer un instrument efficace de redistribution. Les recettes de cette taxation pourraient bénéficier aux ménages dont le pouvoir d’achat a été détérioré par l’inflation et aux entreprises en grande difficulté notamment parce qu’elles ne pouvaient pas répercuter la hausse importante de leurs coûts sur les prix. Mais, les gouvernements sont souvent réticents pour adopter le principe de la taxation des profits excessifs et son extension à toutes les entreprises à cause de leur crainte d’une fuite de certains grands groupes hors de l’Europe vers des pays pratiquant une fiscalité plus généreuse. Pourtant l’expérience passée montre que l’attrait des entreprises pour un pays n’est pas lié uniquement aux considérations fiscales. De plus, l’annonce d’une taxation limitée aux périodes de crises importantes inciterait probablement peu d’entreprises à changer de stratégie [10].
L’émergence des superprofits résulte des stratégies de certaines entreprises. Son analyse se place donc dans une perspective d’offre. Quant à la taxation des superprofits, elle relève essentiellement de la politique budgétaire. Mais la politique monétaire qui porte essentiellement sur la demande peut également exercer certains effets sur les superprofits et en subir des influences.
6. Politique monétaire de la BCE et superprofits
La hausse des trois taux d’intérêt directeur de la BCE qui est destinée à freiner l’inflation par une pression sur la demande macroéconomique ne semble pas adaptée à la lutte contre l’inflation par les profits excessifs. Par contre, elle peut favoriser le développement de tels profits, en particulier dans le secteur bancaire. En effet, dans ce secteur, les hausses du taux d’intérêt peuvent générer des profits excessifs si les banques n’augmentent pas la rémunération des comptes de leurs clients et tant que les demandes de crédit se maintiennent ou diminuent faiblement. On peut cependant espérer que, si la politique de hausse des taux d’intérêt réussit à freiner l’évolution de la demande macroéconomique, elle peut contribuer à réduire le pouvoir de marché des grandes entreprises qui, face à un freinage de la hausse de la demande, pourraient atténuer leurs stratégies générant des superprofits. Mais cette politique monétaire rigoureuse de la BCE risque aussi de réduire les débouchés des autres entreprises. Elle aura notamment des effets négatifs sur l’activité de la plupart des petites et moyennes entreprises, au moment où elles doivent faire face à des difficultés, comme celles de trouver de la main d’œuvre, notamment en France, et celles d’absorber les hausses des coûts de l’énergie et de certains intrants. La baisse de l’inflation qui peut résulter de cette politique risque donc d’être obtenue au prix d’une diminution de l’activité économique et d’une hausse du chômage.
Si, d’une façon générale, les superprofits sont assez peu influencés par la politique monétaire, ils peuvent par contre agir d’une façon importante sur la gestion de cette politique. En effet, l’existence des superprofits influence la politique monétaire en augmentant l’écart entre la cible inflationniste de la BCE (taux d’inflation annuel de 2 %) et l’inflation globale dont une partie est formée par l’inflation due aux superprofits. De ce fait, pour atteindre sa cible, la BCE doit mener une politique plus rigoureuse et plus nuisible pour l’activité économique qu’en l’absence de superprofits. C’est ainsi que le taux d’inflation de 2,4 % atteint en novembre 2023, proche de la cible de la BCE, est obtenu grâce à un taux de refinancement principal de la banque centrale de 4,5 % ce qui est déjà considéré comme excessif, mais qui renforce les effets de la baisse des prix de l’énergie. Cette rigueur risque de devoir être renforcée si l’accord passé en 2023 entre les membres de l’OPEP de réduire l’offre de pétrole freine ou annule la baisse des prix de l’énergie et/ou si un nouveau choc externe provoqué par une extension éventuelle du conflit né en Israël à tout le Moyen-Orient aboutissait à de nouvelles hausses des prix de l’énergie génératrice d’inflation. Cette rigueur de la politique monétaire pourrait être atténuée par une diminution des superprofits qui réduirait l’écart entre l’inflation globale et la cible de la BCE.
Mais comme une telle diminution est difficile à obtenir par la politique monétaire, on peut envisager de réduire l’écart entre l’inflation globale et la cible de la BCE en augmentant cette dernière. Cette proposition pourrait s’intégrer dans celles de nature plus générale qui préconisent une hausse de la cible en vue d’éviter une politique monétaire trop restrictive. Dans cette optique, Olivier Blanchard, ancien chef économiste du FMI, propose de relever le niveau de la cible de 2 % à 3 %. D’autres propositions suggèrent même de passer à 4 %. Ces hausses qui rapprocheraient le taux d’inflation globale de la cible permettrait de réduire la rigueur actuelle de la politique monétaire. En effet, la BCE pourrait diminuer son taux de refinancement principal actuel si sa cible était par exemple de 3 %. Elle pourrait ainsi obtenir un taux d’inflation égal ou un peu supérieur à cette nouvelle cible, compte tenue de la baisse des prix de l’énergie, tout en détériorant moins l’activité économique. Les incidences de l’inflation par les superprofits sur l’inflation globale pourraient ainsi être réduites ou supprimées.
Une réforme consistant à réduire le niveau de la cible inflationniste nécessiterait que la BCE renonce à assurer la stabilité pour laquelle les traités européens lui donnent mandat, en ciblant un taux d’inflation annuel de 2 % à moyen terme. Une telle renonciation poserait un problème de nature politique plutôt qu’économique. En effet, comme le note Pollin (2023), le choix d’une telle cible semble résulter de divers compromis politiques et non d’une analyse théorique. Une telle réforme est justifiée par le fait que le choix de la cible actuelle a été effectué dans une situation fondamentalement différente de celle dans laquelle se trouve actuellement la ZE. En effet celle-ci subit la plus forte inflation de ces vingt dernières années dont une partie est générée par le développement des superprofits. De plus, elle doit faire face à de nouveaux défis, comme le réchauffement climatique, les inégalités et le vieillissement de la population. Le traitement de ces défis nécessite de nouvelles sources de financement auxquelles il sera difficile d’accéder en cas de taux d’intérêt élevés. De plus, de tels taux risquent d’entraîner une baisse importante de l’activité économique et une hausse du chômage.
Mais, la proposition d’une hausse du niveau de la cible inflationniste est mal reçue par les responsables de la BCE et d’autres banques centrales, comme la FED, qui craignent que cette réforme risque de porter atteinte à la crédibilité de leurs banques avec des effets néfastes sur les taux d’intérêt des marchés financiers internationaux. Plutôt que d’augmenter sa cible, la BCE se contentera probablement, comme elle l’a fait au cours de ces dernières années, d’introduire une certaine souplesse dans la gestion de la cible actuelle (Cecioni et al., 2021).
7. Conclusion
Il semble que les autorités publiques se préoccupent beaucoup plus de l’évolution des salaires que de celle des profits par crainte de l’émergence d’une boucle salaires-prix comme dans les années 1970. Il paraît normal que les salariés s’efforcent de rattraper leur perte de pouvoir d’achat, mais il est peu probable que la hausse des salaires qu’ils obtiendront débouche sur une boucle salaires-prix dans le contexte de faible croissance actuelle qui sera renforcé par les effets des politiques budgétaires et monétaires restrictives. Les préoccupations des autorités publiques devraient plutôt porter sur le niveau et l’évolution des superprofits. En effet, ces profits alimentent une boucle profits-prix qui, à la différence de la boucle salaires-prix, se manifeste dès maintenant par ses incidences sur l’inflation.
Une seconde raison pour les autorités publiques de s’occuper des superprofits et des hausses de la valorisation boursière se trouve dans les recettes que pourraient fournir leurs taxations à leurs finances publiques. Dans ce domaine, les États montrent une certaine frilosité, alors que l’importance des recettes issues de telles taxations permettrait de financer notamment les services publics, la lutte contre les effets des changements climatiques et contre la pauvreté due à l’inflation. Plusieurs études récentes ont proposé des évaluations des recettes potentielles issues de divers systèmes de taxation en montrant que l’importance de ces recettes dépend du niveau et de l’assiette de cette taxation. C’est ainsi que la contribution temporaire de solidarité de 33 % instaurée par la Commission européenne sur les profits excédentaires réalisés dans les secteurs de la production de pétrole, de gaz, et de charbon et dans le secteur du raffinage pourrait rapporter environ 26 milliards d’euros selon Zucman et al. (2023). Cette disposition européenne a été transposée dans le droit français en octobre 2023. Mais, comme elle n’est appliquée en France qu’au secteur de l’extraction, de l’exploitation minière et du raffinage de pétrole, elle ne générera que 200 millions d’euros de recettes publiques en 2023, loin des milliards d’euros espérés dans le cas d’une taxation des producteurs de pétrole. Le même taux de taxation de 33 % appliqué aux gains de valorisation boursière obtenus de janvier à septembre 2022 par les plus grandes entreprises énergétiques opérant en Europe [11] aurait généré une recette de 65 milliards d’euros, soit 1,3 % du PIB de l’UE [12] (Zucman et al., 2023).
Les rentrées fiscales importantes que pourraient générer certains systèmes de taxation permettraient non seulement de financer des besoins nouveaux, mais aussi de contribuer à l’assainissement des finances publiques en réduisant les déficits et l’endettement des États de la ZE qui représentent respectivement 3,3 % et 90,3 % du PIB de la ZE en 2023. Il serait donc possible de réaliser un tel assainissement sans recourir à la politique budgétaire restrictive que l’on envisage de mener et qui risque de peser lourdement sur l’activité économique de la ZE.
Références bibliographiques
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[1] Dans l’ensemble du présent article, la variation du taux d’inflation annuel défini à chaque mois d’une année est calculé par rapport au taux d’inflation du même mois de l’année précédente.
[2] Le CAC40 est l’indice boursier principal de la place de Paris mis en œuvre en 1988. Il recouvre les valeurs des 40 plus importantes sociétés françaises en termes de capitalisation boursière.
[3] Dans la ZE, les quatre pays suivants possèdent encore un système d’indexation des salaires sur l’inflation : Belgique, Chypre, Luxembourg et Malte. La France a mis fin à ce système en 1982. Elle applique cependant à l’heure actuelle, une indexation du SMIC.
[4] La plupart des Etats de la ZE ont pris des mesures consistant à prendre en charge une partie du manque à gagner des entreprises et des ménages. Les mesures en faveur des ménages ont pris la forme de plafonnement des prix de détails ou de baisses de redevances et de taxes. Certains pays, comme la France, ont mis en place des boucliers tarifaires (subventions aux combustibles, chèques énergie) (Celasum et Iakova, 2022)
[5] Les prix de l’énergie qui étaient déjà croissants avant février 2022 ont bondi après le déclenchement du conflit russo-ukrainien. De juin 2021 à juin 2022, le prix du baril de pétrole est passé de 73 à 122 dollars. Le prix du gaz a subi une hausse importante lorsque les exportations de la Russie vers l’Europe ont commencé à diminuer en juin 2022. Les prix du charbon ont beaucoup augmenté après février 2022, puis ils sont restés à un niveau élevé dans les mois suivants (Zucman et al., 2023).
[6] Selon Eurostat (2023b), le taux de croissance du PIB de la ZE était de 1,8 % au quatrième trimestre 2022. Il a ensuite diminué du premier au troisième trimestre 2023 par rapport aux mêmes trimestres de l’année précédente de 1,1 %, de 0,5 % et de 0,1 %. Plusieurs pays dont l’Allemagne et l’Autriche ont une baisse de leurs PIB au troisième trimestre par rapport au même trimestre de 2022. On peut noter que le PIB de la ZE du troisième trimestre par rapport au trimestre précédent a baissé de 0,1 %.
[7] Selon Eurostat (2023a), les coûts horaires de la main d’œuvre ont augmenté de 5 % au premier trimestre 2023 par rapport au premier trimestre 2022. Les salaires et les traitements qui constituent l’une des composantes de ces coûts ont augmenté de 4.6 %, alors que l’inflation évoluait de 10 % en janvier 2023 à 8,5 % en février et à 6,9 % en mars. Dans le secteur de l’industrie ils n’ont augmenté que de 3 ,6 %. Par contre, dans les secteurs de la production et de la distribution d’électricité, de gaz et d’air conditionnée, cette hausse était de 9,8 %.
[8] En octobre 2023, la France a cependant proposé un amendement au projet de loi des finances de 2024 en vue de transposer dans le droit français la disposition européenne sur l’instauration d’une contribution temporaire de solidarité pour les entreprises du secteur énergétique. Mais cette contribution est limitée en France au secteur du raffinage. Elle écarte ainsi les entreprises de production énergétique sources importantes de superprofits.
[9] Propos tenus lors de l’université d’été du Medef du mois d’août 2022.
[10] Par exemple l’annonce d’une taxation ponctuelle des hausses des capitalisations boursières n’incitera probablement pas les entreprises cotées à quitter la bourse.
[11] Pour effectuer cette estimation, Zucman et al. (2023) se sont fondés sur les données de 300 entreprises énergétiques cotées en bourse dont les valorisations boursières ont augmenté sensiblement de janvier à septembre 2022.
[12] Une répartition équitable de la recette de 65 milliards d’euros entre les 447 millions d’habitants de l’UE fournirait à chacun d’entre eux 145 euros. Pour un taux d’imposition de 50 %, la recette serait de 96 milliards d’euros, soit 220 euros par habitant (Zucman et al., 2023).
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